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« Le débat autour de la grâce se pose sans doute moins sur le terrain de la légitimité que sur celui de son utilisation »

Prérogative du président de la République, dont Jacqueline Sauvage a récemment bénéficié, ce droit discrétionnaire devrait être davantage encadré, expliquent les juristes Cédric Martins et Jeremy Kalfon.

Publié le 24 mai 2016 à 12h36, modifié le 26 mai 2016 à 16h56 Temps de Lecture 4 min.

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« Le projet de réforme constitutionnelle de 2008 avait envisagé la mise en place d’une commission consultative des grâces, proposition qui fut rejetée par les sénateurs qui estimaient que c’était au président seul d’assumer cette prérogative.  »

Par Cédric Martins et Jeremy Kalfon, élèves avocats à Paris

Le 31 janvier, le président de la République annonçait accorder à Jacqueline Sauvage une grâce « partielle », réduisant sa peine de près de deux ans et demi. Le sort de cette femme, condamnée à dix ans de réclusion criminelle en appel pour le meurtre de son mari, dépeint comme le tortionnaire de sa propre famille, avait été considéré comme moralement injuste par une partie de l’opinion publique.

C’est sur le fondement de l’article 17 de la Constitution que le président de la République peut faire grâce, c’est-à-dire dispenser un condamné, uniquement à titre individuel depuis 2008, d’exécuter tout ou partie de sa peine. Cette pratique héritée de la tradition monarchique est régulièrement critiquée par les responsables politiques.

Et pour cause, avec l’abolition de la peine de mort, le droit de grâce semble avoir perdu aux yeux de certains sa principale raison d’être : celle d’ultime recours avant l’irréparable. En 2006, François Hollande la jugeait ainsi « peu compatible avec l’esprit de la République » car attentant au principe constitutionnel de séparation des pouvoirs.

Une intervention excessive

Contrairement à une amnistie, une grâce n’efface pas la condamnation, ce qui pour certains constituait la preuve de l’absence d’interférence du pouvoir exécutif dans le domaine de l’autorité judiciaire. Cependant, une décision de justice définitive est dotée d’une force de la chose jugée qui la rend exécutoire. Ainsi, en portant atteinte à l’exécution de la décision de justice, l’exercice du droit de grâce constitue bien une immixtion du pouvoir exécutif dans le domaine judiciaire.

D’ailleurs, si le président n’a accordé qu’une grâce partielle à Mme Sauvage, laissant donc la décision finale de remise en liberté aux mains du juge d’application des peines, c’est certainement parce que lui-même considérait la grâce totale comme une intervention excessive dans le fonctionnement de la justice. Le droit de grâce n’est pas pour autant dénué de légitimité. C’est en tant qu’incarnation de la nation et du peuple souverain que le président de la République peut faire grâce, c’est d’ailleurs pourquoi il ne peut déléguer ce pouvoir.

Ainsi, tout comme la justice est rendue au nom du peuple français, le droit de grâce est une expression du souverain, comme si ce dernier venait exceptionnellement transcender le principe de séparation des pouvoirs, punissant via l’autorité judiciaire et pardonnant par l’intermédiaire de son premier représentant.

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