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Etats-Unis : une exécution ratée qui tourne à la torture dans l'Oklahoma

Dans l'Oklahoma, un condamné à mort par injection a repris conscience pendant une dizaine de minutes, avant de mourir d'une attaque cardiaque.

Le Monde avec AP et AFP

Publié le 30 avril 2014 à 03h47, modifié le 30 avril 2014 à 11h44

Temps de Lecture 4 min.

L'Etat d'Oklahoma devait procéder, mardi 29 avril, à une double exécution pour la première fois depuis près de quatre-vingts ans. Clayton Lockett et Charles Warner devaient être tués par injection dans une prison située dans une petite ville au sud-est d'Oklahoma City.

Mais tout ne s'est pas passé comme prévu. Ces deux exécutions devaient être réalisées au moyen d'un nouveau protocole qui n'avait jamais été testé. La nouvelle procédure prévoit l'injection de trois produits au condamné : un sédatif, un anesthésiant et du chlorure de potassium à dose mortelle.

REPRISE DE CONSCIENCE

A 18 h 23 (1 h 23 à Paris), le premier produit a été administré à Clayton Lockett, condamné à mort en 2000 pour le viol et le meurtre d'une jeune femme, qu'il avait enlevée, frappée et enterrée vivante. Le condamné a été déclaré « inconscient » à 18 h 33. On lui a injecté les deux autres produits prévus.

Puis, trois minutes plus tard, il s'est mis à bouger, respirant très fort, serrant les dents et tentant de relever la tête. Des témoins indiquent, selon le New York Times, que l'homme a pu prononcer des mots (« man », « mec » en anglais).

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Un membre de l'équipe pénitentiaire est venu tirer les rideaux pour empêcher les témoins de l'événement de voir la suite, rapporte l'agence Associated Press, dont une journaliste a donné le détail des faits sur son compte Twitter après être sortie de la salle d'exécution.

« UNE SUFFOCATION ET DES DOULEURS ATROCES »

Un médecin est venu ensuite examiner l'endroit où la piqure avait été faite et a découvert qu'une veine avait éclaté, empêchant le sédatif d'agir convenablement, selon les explications données par le directeur de l'administration des prisons d'Oklahoma, Robert Patton.

Le New York Times précise que, sans l'effet prévu du sédatif, l'injection des deux autres produits provoque « une suffocation et des douleurs atroces ». « C'était extrêmement difficile de voir ça. Ça ressemblait à de la torture », ont déclaré, à la sortie de la salle d'exécution, les avocats de Clayton Lockett. Le condamné est finalement mort d'une crise cardiaque à 19 h 06, soit près de trois quarts d'heure après le début de l'exécution.

La deuxième, initialement prévue deux heures plus tard, a été immédiatement repoussée de quatorze jours. La gouverneur de l'Etat, Mary Fallin, a demandé « un examen complet de la procédure ». Charles Warner a été condamné en 1997 pour le viol et le meurtre de la fillette de 11 mois de sa compagne.

« DANS UN CLIMAT DE SECRET ET DE DÉMAGOGIE POLITIQUE »

Ce problème intervient alors que les deux hommes avaient précisément réclamé à maintes reprises des informations plus précises sur le barbiturique mortel devant leur être injecté.

Depuis le refus des fabricants européens de fournir l'anesthésiant le plus courant, le pentobarbital, pour des exécutions, plusieurs Etats américains se trouvent confrontés à une pénurie de barbituriques et bataillent pour trouver une solution de repli, ce qui donne lieu à une multiplication des recours judiciaires. Nombre d'entre eux font appel à des préparateurs en pharmacie, qui ne sont pas homologués au niveau fédéral.

Le site d'information Mother Jones rapporte que le mélange utilisé mardi n'avait été utilisé qu'une seule fois en Floride, en 2013, et avec des doses cinq fois plus importantes, et que l'Etat d'Oklahoma, voulant rester discret sur la provenance de ces produits, n'aurait pas gardé trace de la transaction liée à leur achat.

A gauche, Clayton Lockett, à droite, Charles Warner, condamnés à mort dans l'Etat d'Oklahoma.

Les deux condamnés d'Oklahoma avaient obtenu en mars le report de leurs exécutions, dont la procédure ne prévoyait pas initialement d'anesthésiant pour les injections intraveineuses. L'Etat d'Oklahoma avait ensuite réussi à s'approvisionner et à changer la procédure.

Après avoir suspendu indéfiniment ces deux exécutions, le temps de résoudre cette controverse, la Cour suprême de l'Oklahoma avait estimé que les deux hommes « n'avaient pas plus le droit aux informations qu'ils demandaient que s'ils étaient exécutés sur la chaise électrique ». Ils avaient alors épuisé tous leurs appels. Leurs avocats avaient renoncé, en milieu d'après-midi mardi, à déposer un ultime recours devant la Cour suprême.

L'avocate de Charles Warner avait néanmoins fortement mis en cause la procédure mise en place.

« Ce soir, dans un climat de secret et de démagogie politique, l'Oklahoma a l'intention d'exécuter deux condamnés à mort en utilisant un nouveau protocole expérimental, dont un paralysant, qui empêche de savoir si les exécutions auront pour effet des souffrances cruelles et inhabituelles. En dépit de nos demandes répétées, l'Etat refuse encore de fournir des informations sur la source, la pureté, les tests et l'efficacité des produits qui seront utilisés. Nous ne savons même pas si les produits ont été achetés légalement », déclarait-elle avant les exécutions.

L'année 2013 a été pour la peine de mort aux Etats-Unis une année de déclin, marquée par des exécutions et des condamnations à la peine capitale à des niveaux parmi les plus bas depuis des décennies. Selon un rapport annuel du Centre d'information sur la peine de mort (DPIC), 39 condamnés à mort ont été exécutés en 2013 aux Etats-Unis, contre 43 en 2012. Depuis 1999 – année record, avec 98 exécutions – ce chiffre a décru de 60 %.

La peine de mort dans le monde

Le Monde avec AP et AFP

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