Quelques cacahuètes contre l'allergie aux arachides

Il serait possible de prévenir les réactions - parfois dramatiques - provoquées par les arachides chez un nombre élevé d'enfants en leur donnant précocement de petites quantités de cacahuètes, noix ou autres pistaches. C'est ce que viennent de démontrer le docteur George du Toit, du King's College à Londres, et ses collègues dans une étude portant sur 640 enfants suivis de l'âge de 4 mois et jusqu'à 5 ans qui présentaient des signes avant-coureurs d'allergies aux arachides comme une dermatite atopique sévère (une forme d'eczéma) et/ou une allergie à l'oeuf. Un certain nombre d'entre eux réagissaient même déjà positivement au test cutané (prick-test) de réaction à l'arachide.

En pratique, ces jeunes ont été répartis en deux groupes : les uns devaient au maximum éviter les protéines d'arachide, les autres en recevaient au moins 2 grammes (l'équivalent de 10 cacahuètes) en une fois au cours de la première et la deuxième année de vie, puis au moins 3 grammes une semaine sur deux jusqu'à l'âge de 5 ans. Les médecins ont ensuite évalué la fréquence de leur allergie à l'arachide : parmi ceux ayant un test cutané négatif au départ, elle était de 13,7 % chez ceux qui ont suivi le régime d'éviction et de 1,9 % chez ceux qui ont consommé de l'arachide précocement. Les résultats étaient respectivement de 35,3 % et de 10,6 % parmi les jeunes dépistés comme sensibles à ces protéines.

"Moduler" la réponse immunitaire

Autrement dit, peut-on lire dans le communiqué du New England Journal of Medicine qui publie ces travaux, "l'introduction précoce de l'arachide diminue de 86,1 % le risque d'allergie à cette plante parmi les enfants non sensibilisés et de 70 % chez les enfants sensibilisés". Cela montre donc que l'introduction précoce d'arachide est capable de "moduler" la réponse immunitaire chez les enfants à risque. Ces résultats sont d'autant plus importants que le nombre de jeunes touchés par cette allergie ne cesse d'augmenter. Il aurait même doublé au cours des dix dernières années, peut-être en raison de l'usage croissant des arachides dans l'alimentation du fait de leur valeur nutritive et de leur faible coût. Qui plus est, ces produits améliorent le goût, le volume et la consistance de nombreuses préparations culinaires.

Dans un éditorial accompagnant l'article du NEJM, les docteurs Rebecca Gruchalla, de l'University of Texas Southwestern Medical Center à Dallas, et Hugh Sampson, de l'Icahn School of Medicine at Mount Sinai à New York, ne cachent pas leur enthousiasme. Ils jugent ces résultats "tellement convaincants et le problème de la prévalence croissante de l'allergie à l'arachide si alarmant que de nouvelles recommandations devraient paraître prochainement". Et pourtant, des questions restent encore en suspens : faut-il introduire l'arachide impérativement avant 11 mois ? Quelle est la dose optimale ? Peut-on en utiliser moins ou à un autre rythme ? Et combien de temps cet effet positif dure-t-il ? Enfin, les parents devront toujours faire attention à ne pas laisser les cacahuètes à portée de main des jeunes enfants, allergiques ou non, car le risque d'étouffement est toujours bien réel...