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Apple News, la boîte noire qui fait la pluie et le beau temps sur les sites d'infos

Alors que Facebook a cessé de donner la priorité aux informations, Apple News s'est imposé comme une source majeure de renvoi de trafic pour les sites d'information français.

Le « widget » d'Apple News en France
Le « widget » d'Apple News en France (Les Echos)

Par Marina Alcaraz, Nicolas Madelaine

Publié le 30 nov. 2018 à 06:30Mis à jour le 30 nov. 2018 à 20:31

C'est un petit encadré accessible d'un simple glissement de pouce sur l'iPhone, mais il peut changer le sort de certains éditeurs de presse. Entrer dans la sélection des titres de presse d'Apple est devenu le Graal de nombreux médias.

Selon Jean-Paul Dietsch, directeur de l'ACPM-OJD, environ 25 % du trafic mobile des grands sites d'information pourraient être liés à ce « widget » d'Apple. Une estimation confirmée par le cabinet Semiocast, spécialisé sur les réseaux sociaux : un quart du trafic sur les mobiles viendrait d'Apple, au même niveau que les réseaux sociaux, que les moteurs de recherche et que l'accès direct au site.

C'est beaucoup au moment où le changement d'algorithme de Facebook, en début d'année (privilégiant les amis et la famille dans la page d'accueil des utilisateurs au détriment des sites d'information) a pesé sur les médias. « Pour certains sites, Apple représente même davantage », explique Paul Guyot, directeur de Semiocast.

Un quart du trafic

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Mais entrer dans le saint des saints est réservé à un petit nombre. Le widget d'Apple est une boîte noire. Il y a un contact Apple pour les médias français mais c'est un algorithme à San Francisco qui choisit, dit Paul Guyot. La firme à la pomme cultive le secret, ne faisant aucun commentaire. Au début, les éditeurs eux-mêmes ont eu du mal à identifier Apple News comme la source d'une hausse soudaine de leur audience.

Le premier mystère porte sur le choix des heureux élus : un club très fermé de 24 médias, comprenant BFMTV, Franceinfo etc., les sites de presse nationale (comme « Le Figaro », « Le Monde », « Le Parisien », « Les Echos » etc.) mais encore « Mediapart », « Francesoir » ou le moins connu « 24matins.fr ». « Il y a les plus importants, mais la liste n'a vraisemblablement pas été faite avec le classement formel sur la base du nombre de visites, reprend Paul Guyot. Pendant un moment, Apple n'a pas pris les sites ne commençant pas par www, comme l'Obs, ce qui avait déclenché la colère de plusieurs médias ». Plusieurs ont fait pression pour être intégrés dans la sélection d'Apple, avec plus ou moins de succès. « Celui-ci est toutefois passé de 20 à 24 titres récemment », reprend-il.

24 titres heureux élus

Gare à ceux chassés de cet eldorado, à l'image de « Marianne », qui a vu son nombre de visites plonger de 35 % entre octobre et novembre 2017 et ses revenus publicitaires baisser, raconte un article fouillé du magazine . Et, les médias en sont bien conscients.

« Apple est important mais irrégulier et peu lisible », note un autre grand éditeur. « Cet outil d'Apple est presque un danger dans la mesure où on s'habitue à cette audience massive. Mais, elle peut disparaître du jour au lendemain. Et l'audience n'est pas forcément engagée, et n'a pas forcément d'attachement à la marque », appuie Guillaume Bournizien, digital marketing manager du « Parisien » (groupe Les Echos). Celui-ci ajoute toutefois : « Il est intéressant de vérifier que cette audience est bien monétisée, en ajoutant par exemple une vidéo ».

Le choix des sujets - quatre sont mis en avant - conduit les dirigeants de médias à se triturer les méninges. Les « gagnants » ne sont pas les mêmes selon les régions géographiques de France. S'il y a des papiers très sérieux dans le coeur de l'actualité sélectionnés, d'autres sont plus anecdotiques voient les « clics » s'emballer. Par exemple, au moment où nous écrivons ces lignes, c'est un article autour de traces de matière fécale retrouvées sur les écrans tactiles de McDo qui est sélectionné.

Les articles - qui changent tous les quarts d'heure en général - peuvent rester jusqu'à douze heures d'affilée ! Leur audience se chiffre en centaines de milliers de clics au minimum. Au « Figaro », on estime que cela peut multiplier l'audience par dix.

Dynamisme sur Twitter

Selon Semiocast, l'algorithme n'est pas si complexe. Les contenus mis en avant le sont en fonction de leur dynamisme sur les réseaux sociaux et en particulier sur Twitter (nombre de partages, de like etc.). Le sujet doit donc être en résonance avec la communauté des lecteurs des titres. Le moment de publication joue beaucoup pour laisser le papier résonner sur la toile. « Ce qui a des conséquences dans l'organisation : il ne faut pas par exemple publier plusieurs papiers importants au même moment », reprend Paul Guyot.

Toutefois, la seule corrélation avec Twitter ne semble pas suffisante pour Guillaume Bournizien. Il souligne que l'algorithme a dû évoluer récemment. « Nous avons remarqué que le partage devait aussi être fait par des personnes influentes. Par exemple, nous avions été surpris qu'un papier porte sur un décès de journaliste… mais celui-ci avait été retweeté par de nombreux professionnels très suivis, » dit-il.

Toujours est-il que cet outil d'Apple soulève de nombreuses questions. « L'algorithme peut être manipulable. Un mouvement politique peut mobiliser ses membres pour l'influencer », met en garde Paul Guyot.

Marina Alcaraz, Nicolas Madelaine

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