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Climat des affaires : le Brexit peut-il être contagieux ?

« Vous allez nous manquer » (sur les fenêtres du groupe Vert du Parlement Européen en juin 2016). Rebecca Harms/Flickr, CC BY-SA

Grenoble école de Management et l’Association des directeurs financiers et des contrôleurs de gestion (DFCG) recueillent chaque trimestre l’avis des responsables financiers français. Les résultats sont agrégés au niveau mondial par un réseau d’universités coordonnées par Duke University aux Etats-Unis. Pour le troisième trimestre 2016, l’enquête s’est déroulée du 18 août au 3 septembre 2016.

Le Brexit est désormais une réalité à laquelle nous allons devoir nous adapter : dans un avenir relativement proche, le Royaume-Uni ne fera plus partie de l’Union européenne. Quel sera l’impact de cette décision d’un point de vue économique ? Lorsqu’on interroge les responsables financiers, le verdict est sans appel, en particulier en France : plus d’une entreprise sur deux (52.7 %) ayant des activités au Royaume-Uni envisage de les rapatrier à plus ou moins long terme sur le continent !

Même si ce chiffre doit être tempéré par les résultats observés dans d’autres pays comme l’Allemagne où les entreprises ne sont que 20 % à souhaiter rapatrier leurs activités, il en demeure frappant. D’ailleurs, même certaines entreprises du Royaume-Uni (17 %) envisagent d’installer une partie de leurs activités outre-Manche à plus ou moins long terme. En revanche, et ce n’est pas une surprise, aucune n’envisage de parcourir le chemin dans l’autre sens.

Au total, 27 % des entreprises européennes estiment que leurs revenus en provenance du Royaume-Uni vont baisser après la sortie effective du royaume de l’Union. Ces revenus devraient alors passer, selon elles, de 22 % aujourd’hui en moyenne à moins de 14 %. En conséquence, les entreprises montrent leurs préférences pour une sortie tardive, au-delà de 2021 qui leurs permettrait d’adapter leurs organisations au mieux. Mais elles sont nombreuses à anticiper une sortie rapide déclenchée dès 2019 notamment en France, en Allemagne et au Royaume-Uni.

Un Brexit contagieux ?

Lorsqu’on demande aux responsables financiers européens si un autre pays pourrait voter une sortie de l’Union d’ici deux ans, leur réponse ne fait aucun doute…c’est non à plus de 85 % des réponses en moyenne ! En France, ce chiffre ressort à 81 % mais au Royaume-Uni, il tombe à 61 %. Les chances de voir l’organisation d’un nouveau referendum sur le maintien dans l’Union ne seraient donc pas nulles selon ces derniers ? Mais dans quel pays ?

Les réponses que nous avons obtenues font ressortir un résultat étonnant : pour 42.9 % des entreprises britanniques qui envisagent un referendum prochain, c’est aux Pays-Bas qu’il devrait d’abord être organisé puis en…Italie ! Mais lorsqu’on interroge les Hollandais eux-mêmes, la proportion d’entreprises qui anticipent un vote dans le pays est de… 0 % ! Le résultat est similaire en Italie et cette observation se répète plusieurs fois dans notre échantillon : aux Pays-Bas, c’est le Danemark qui fait figure de favori alors qu’en Grèce, c’est l’Autriche ! Pourtant aucun de ces pays ne semble lui-même parier sur un vote domestique.

En règle générale, c’est plutôt l’agenda national qui domine dans chaque pays et non une hypothétique sortie de l’Union. Et, contrairement au Brexit, les incertitudes politiques nationales semblent avoir un effet immédiat sur le comportement des entreprises. Ainsi, en Europe, elles seraient 43 % à ralentir leur plan d’embauche et 57.6 % à ralentir leurs investissements du fait des incertitudes politiques. En France, à quelques mois de la présidentielle, ces chiffres montent à 56.1 % pour l’emploi et 70.2 % pour les investissements.

Les trois clés de réussite de l’entreprise

Au-delà des questions concernant l’actualité politique, nous avons demandé aux responsables financiers quels sont, selon eux, les éléments clés du succès d’une entreprise. Les résultats font ressortir les mêmes points dans de nombreux pays : la mise en place d’un plan stratégique, la culture d’entreprise et la personnalité du dirigeant. Mais ces éléments ressortent dans un ordre différent selon les pays montrant, une nouvelle fois, à quel point l’aspect culturel peut être central dans l’organisation de l’activité d’une entreprise.

Ainsi, en France, c’est le plan stratégique qui est mis en avant par 47.4 % des répondants alors que ce chiffre tombe à 23.5 % au Royaume-Uni. La culture d’entreprise est un point clé en Allemagne (70 %) mais moins en France (36.8 %). Enfin, c’est au Royaume-Uni que le dirigeant (CEO) est mis en avant (52.9 %) contre seulement 40 % en Allemagne et 31 % en France.

Une lente remontée du niveau d’optimisme

Climat des affaires – septembre 2016. Author provided

Enfin, nous notons que le niveau d’optimisme poursuit une lente remontée entamée en début d’année 2016. Il semble toujours pointer vers une croissance future positive de l’activité manufacturière mondiale. Aux États-Unis, l’indicateur passe à 60.6 sur une échelle de 0 à 100, contre 59.4 au trimestre précédent.

En Europe, l’indicateur de climat des affaires s’établit à 56.3 contre un niveau de 55.3 au trimestre précédent. En France, le climat des affaires reste relativement stable à 52.0 contre 52.7 au trimestre précédent ce qui est son niveau depuis bientôt près de 2 ans à l’exception du quatrième trimestre 2015 pour lequel, il est vrai, nous avions interrogé les responsables financiers dans les jours qui suivirent les attentats de Paris.

Dans le reste du monde, la confiance se maintient sur des niveaux relativement élevés au Brésil à 53.3 contre 55 au trimestre précédent et 37 au premier trimestre 2016. Ailleurs dans la région, le niveau d’optimisme est en assez forte baisse au Mexique à 63.3 contre 70.3 en début d’année tout en restant sur des niveaux très élevés. C’est au Pérou que nous trouvons le résultat le plus élevé (69.4) et le plus faible au Chili (40.6). En Asie, l’optimisme est au plus haut en Chine (69.5) et toujours au plus bas au Japon (48).

Pour voir les résultats complets de cette enquête : grenoble-em.com/climat-des-affaires.

Prochaine enquête du 16 novembre au 2 décembre 2016 : ceocfo.org/French.htm

L’enquête Duke University–Grenoble École de Management mesure chaque trimestre depuis plus de 20 ans le climat des affaires tel que perçu par les responsables financiers des entreprises à travers le monde. L’enquête est courte (environ 10 questions). Elle recueille plus de 1 500 réponses anonymes d’entreprises de tous secteurs et de toutes tailles. C’est désormais la plus grande enquête de ce type dans le monde. Une analyse détaillée par pays peut être envoyée à chaque participant.

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