S’il y a un art que Facebook a réussi à maîtriser à merveille, c’est celui du feed, ce mur infini d’appels aux clics sur lequel se perd l’attention quotidienne de plus de 2 milliards de lecteurs. Rien que ça… Un pré carré aux secrets algorithmiques jalousement gardés que les éditeurs du monde entier tentent d’apprivoiser à la recherche de la portée perdue, le fameux reach, dans une concurrence effrénée qui fait monter les enchères. Car, oui, cela fait un bail que le reach organique a pris du plomb dans l’aile. Aujourd’hui, pour qu’une publication suscite de l’engagement (vous savez des likes, des commentaires et des partages), il faut passer à la caisse, même modestement.

Sortie déconseillée

Et pas n’importe quelle publication. De préférence des images (jolies ou polémiques, avec moins de 20% de texte, sinon gare aux réprimandes), en galerie (1 image = 1 point d’engagement), ou des vidéos, courtes et annotées (car souvent consommées muettes), hébergées sur Facebook (vade retro Youtube ou Vimeo). Des contenus qui maintiendront les paires d’yeux tant convoitées dans l’immensité du bleu roi de la matrice de Menlo Park (à propos, si vous voulez savoir pourquoi Zuck a choisi le bleu, c’est par ici).Formation webmarketing

Facebook comprend parfaitement que vous souhaitiez contrevenir à cette règle tacite et inviter les internautes à visiter votre site web, c’est votre droit. Mais l’algorithme vous sera moins favorable (et l’amplification coûtera donc plus cher), logique.

Vous pourrez, si vous le souhaitez, recourir aux “instant articles” pour partager votre prose à même le feed et Facebook vous permettra même de les monétiser, avec sa solution maison. Facebook déclarait en juin 2017 reverser 1 million de dollars par jour aux 10.000 éditeurs ayant recours aux Instant Articles. Cela fait 100 dollars par éditeur, avec sans doute une distribution très 80/20, voire 90/10 (vous savez, la fameuse loi de Pareto, du genre “10% des opérateurs récoltent 90% des revenus”). Cela ne suffit en tous les cas pas à compenser le manque à gagner du secteur à l’heure de la consolidation du marché publicitaire entre une poignée d’acteurs, Facebook et Alphabet (Google) en tête (68% à eux deux du marché de la publicité en ligne en France en juin 2017).

Et alors, on fait quoi ?

Est-ce une évolution irréversible ? Est-il encore possible aujourd’hui d’exister sur la toile en dehors de ces plateformes hégémoniques ? La réponse est oui et cela passe par la re-découverte créative d’un canal de communication qu’on croyait relégué aux archives du world wide web : l’email. Et sa déclinaison éditoriale : la newsletter.

En termes de format, l’email est la seule plateforme “loggée” qui peut encore prétendre concurrencer le tout puissant Facebook en termes de portée. La plupart des internautes ont en effet une adresse email (même si ce canal est plus populaire dans certaines contrées que dans d’autres). Difficile d’avoir des chiffres exacts, mais on estime qu’il y aurait à l’heure actuelle plus de 4 milliards d’utilisateurs ayant une adresse email sur la planète bleue (l’autre, pas celle de Menlo Park), donc en gros deux fois plus que la base d’utilisateurs mensuels de Facebook.

Et la différence ne s’arrête pas là. Une fois que vous avez convaincu un utilisateur de s’inscrire à votre newsletter avec son adresse email, vous établissez une relation qui restera active aussi longtemps que vous respecterez les termes de votre contrat moral avec le destinataire, dont l’attention reste un privilège. Tandis que sur Facebook vous devrez constamment aller réactiver l’engagement de votre base de fans avec, au passage, un petit péage. Imaginez la situation si vous deviez relouer votre liste de diffusion à chaque envoi. Vous ne serez jamais maître de “votre” base sur la plateforme d’un tiers, vous en avez tout au plus l’usage temporaire, sans aucune garantie de pérennité. Car qui donne peut reprendre.

La newsletter, aux allures de micro-feed, vous permet d’instaurer une relation intime avec vos lecteurs. Elle séduit à nouveau des éditeurs de premier plan, comme BuzzFeed, plus journalistique que jamais, ou le New York Times, qui édite aujourd’hui plus de 50 newsletters. Elle se ré-invente aussi à l’heure des bots et de l’intelligence artificielle. Elle n’est plus simplement envisagée comme un canal de génération de trafic, mais bien comme une plateforme à part entière, avec ses propres codes éditoriaux et ses méthodes de monétisation, dont la publicité native, relai de croissance du programmatique. Elle est le complément naturel d’une stratégie web ouverte, en dehors des silos habituels. La prochaine fois que vous amplifierez une publication sur votre page Facebook, pensez à cette alternative qui vous redonnera enfin le contrôle sur la valorisation de vos actifs.

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