Jean-Éric Vergne, le talent gâché de Red Bull

Depuis 2005 et son arrivée en F1, Red Bull a permis à de nombreux pilotes d’obtenir un baquet en Formule 1. De grands noms ont explosé sous la firme autrichienne, comme Sebastian Vettel (bien que pilote BMW à l’origine), Daniel Ricciardo, Carlos Sainz ou bien encore Max Verstappen. Ceci étant, de nombreux talents sont également passés à la trappe ou se sont cassés les dents dans l’académie Red Bull. De Sébastien Buemi à Jaime Alguersuari, en passant par Scott Speed, JEV est probablement le talent le moins exploité par Helmut Marko.

Le programme de jeunes pilotes Red Bull est réputé pour être impitoyable avec ses pilotes. Jean-Éric Vergne en a fait les frais.
JEV, victime du programme impitoyable de Red Bull (©Getty Images)

JEV : les origines

Jean Eric Vergne, né le 25 Avril 1990 à Pontoise, commence ses premiers tours de roue à seulement quatre ans, son père étant propriétaire du circuit de Cormeille-en-Vexin. Il commence le karting en 2000, et remporte le Championnat Minime en 2001. Il intègre l’équipe de France FFSA en 2006 et obtient le titre de sportif de haut niveau, lui permettant d’intégrer les catégories supérieures.

Performant lors de ses éditions en Formules de promotion, JEV impressionne en remportant plusieurs championnats de France. En 2010, il confirme tout son potentiel en devenant le premier Français à remporter la F3 britannique, l’une des compétitions européennes les plus relevées chez les jeunes. Amené à remplacer Brendon Hartley la même année en Formule Renault 3.5 (également membre de l’académie Red Bull), il signe quatre podiums en six courses, lui offrant ses premiers test avec Toro Rosso à Abou Dabi, en 2010.

En 2011, après une saison intense face à son coéquipier Robert Wickens, il termine vice-champion de Formule Renault 3.5. Ses performances sont suffisantes pour lui offrir un volant aux essais libres à partir du Grand Prix de Corée du Sud. Vergne continue sa progression sans accroc et fait mieux que ses coéquipiers de l’époque, Alguersuari et Buemi. À la fin de la saison, il est convié par Red Bull aux Rookie Days d’Abou Dabi, où il termine premier des trois jours d’essais. En novembre 2012, il est confirmé en tant que pilote officiel chez Toro Rosso aux côtés de l’Australien Daniel Ricciardo.

Toro Rosso : des hauts et débats

Pour sa première saison en Formule 1, dans une modeste Toro Rosso reléguée en fin de peloton, JEV réussit à rentrer dans les points à quatre reprises, à chaque fois en huitième position. Il inscrit ses premiers point dès son deuxième Grand Prix, en Malaisie, et terminera 17ème du championnat avec 16 points. Il domine son coéquipier, mais son image se ternie déjà par son caractère parfois tumultueux et arrogant.

En 2014, Vergne survole son jeune coéquipier Daniil Kvyat, mais ne sera pas récompensé. Au contraire, sa carrière en F1 prenait fin, envolée avec de nombreux espoirs.
JEV dans les rues monégasques, en 2014 (©Motor1)

En 2013, pour sa seconde saison chez Toro Rosso, Vergne ouvre une nouvelle fois son compteur en Malaisie avec une dixième place. Mais le peu de performances et le manque de fiabilité de l’écurie italienne ne lui permettent pas de briller tout le long de la saison. JEV signe deux coups d’éclats coup sur coup, en Espagne et au Canada, où il termine respectivement 8ème et 6ème. Cependant, il n’inscrira plus aucun point de la saison. Vergne termine 15ème du championnat avec 13 points, et cette fois-ci Ricciardo prend le dessus sur le Français, lui permettant d’obtenir le baquet laissé vacant par Webber chez Red Bull pour la saison 2014. 

Vergne est revanchard, et veut montrer qu’il a le potentiel pour monter dans une Red Bull. Il commence sa saison avec une huitième place en Australie. Facilement plus rapide que son nouveau coéquipier Daniil Kvyat, le Français réalise la meilleure saison de sa carrière et montre enfin qu’il sait être constant. Il termine sixième à Singapour et inscrit huit points, soit le total de son équipier sur la saison. Il boucle la saison à la treizième place du championnat, avec 22 points.

Mais Vergne va vite déchanter. Malgré des performances à la hauteur et le départ de Vettel pour Ferrari en 2015, laissant le siège de Red Bull vacant, celui-ci est pris par le Russe Daniil Kvyat. Une décision qui semble être politique, au vu du Grand Prix de Russie tout fraîchement instauré au calendrier. Encore pire : arrivé au terme de son contrat de trois saisons chez Toro Rosso, Red Bull veut laisser sa chance à de nouveaux jeunes talents. Le duo le plus jeune de l’histoire, composé de Carlos Sainz (20 ans) et Max Verstappen (17 ans), est aligné chez Toro Rosso, poussant le Français vers la sortie.

Le succès en Formule E

Après sa désillusion dans la catégorie reine, Vergne pense se tourner vers l’Indycar et les États-Unis. Il noue des contacts avec Andretti, écurie mythique du championnat américain. Cependant, la structure a pris la route inverse et s’est rapprochée de l’Europe pour lancer son équipe de Formule E en 2014. L’écurie engage Franck Montagny, qui sera remplacé après deux meetings par son compatriote, JEV. Le Français fait forte impression puisqu’il signe une pole position dès son premier E-Prix, et signe deux podiums dans la saison.

Sa conquête de l’Ouest attendra, puisque le Français compte s’inscrire dans la durée en Formule E, et réussir là où il a échoué en F1. Pilote pour le compte de Virgin lors de la saison 2015-2016, il inscrit deux nouveaux podiums mais se montre très irrégulier. Le Français est rapide mais n’arrive pas à se mettre au niveau de ses concurrents sur toute une saison. Après une saison chez Virgin, il décide de signer dans la nouvelle écurie chinoise Techeetah.

C'est finalement en Formule E que Jean-Éric Vergne connaîtra les sommets. Ici, le Francilien fête son premier titre, à New-York.
En Formule E, JEV atteint enfin les sommets (©Techeetah)

Pour sa troisième saison dans la catégorie électrique, JEV confirme enfin son potentiel. Souvent aux avant-postes, il signe cinq podiums dont une victoire lors de la dernière manche de la saison à Montréal. Il termine 5ème du championnat dans un plateau très talentueux, avec Buemi, Di Grassi ou encore Rosenqvist. Mais le meilleur reste à venir pour Vergne en 2017-2018. Après trois saisons en rodage, il signe la pole dès le premier E-Prix à Hong Kong. Sa saison est étonnante de régularité, ne lui offrant que très peu de concurrence, et JEV réalise six podiums dont quatre victoires. Il ne terminera d’ailleurs qu’une seule fois en dehors du top 5. En 2018, il devient le quatrième champion incontesté de Formule E.

La catégorie électrique a connu quatres champions différents en quatre ans. Mais Vergne va rompre la tradition, en réalisant une nouvelle saison pleine en 2018-2019. Le Français s’impose à trois reprises et signe cinq nouveaux podiums. Bien qu’il vive une saison plus compliquée que l’année précédente, le plateau est tellement disputé que JEV devient l’unique double champion du monde de Formule E à l’heure actuelle. Une chose est sûre, le Français a déjà marqué la jeune histoire de cette discipline, et malgré un début d’année compliqué, son talent n’est plus à prouver.

Un retour en F1 ?

Bien que Vergne ait réussi à faire ses preuves en Formule E, est-il possible de le revoir un jour dans un baquet de Formule 1 ? Difficile à dire. Le natif de Pontoise a déjà 30 ans, et bien que des trentenaires aient déjà réussi à revenir après une pause (comme Räikkönen, Kubica, Klien ou de la Rosa), pas sur que ce projet soit celui dont JEV rêve. 

D’autant plus qu’à de nombreuses reprises, son nom est revenu dans le paddock de Formule 1. Dès 2015, il a été pilote de réserve chez Ferrari, déclarant même :“Je préfère être sur le banc de touche chez Ferrari que titulaire dans une équipe comme Caterham ! 

Le talent de JEV n'est plus à prouver : la Scuderia Ferrari ne l'aurait jamais pris sous aile sans un minimum de talent. Mais le Français semble entretenir une rancœur envers le monde de la F1, et ne souhaiterait pas s'y retrouver de si tôt.
Vergne au volant d’une Ferrari lors du Clipsal 500, à Adélaïde, en 2015 (©DR)

Bien qu’il donne satisfaction à la Scuderia, il est un temps pressenti pour signer chez Haas en 2016. L’écurie américaine, roulant avec un moteur Ferrari, pouvait avantager JEV. Mais c’est finalement Romain Grosjean et Esteban Gutierrez qui seront retenu par Günther Steiner. Une nouvelle fois, Vergne se retrouve sur le carreau.

Mais après ses titres en Formule E, certaines rumeurs auraient renvoyé le Français vers la F1, où un contrat lui aurait été proposé. Même si l’on n’a jamais réellement su quelle équipe l’avait contacté, le Français a préféré rester du côté de l’électrique. Il avait également été pressenti pour faire quelques courses en fin de saison chez Toro Rosso, à la place de Brandon Hartley, où cette fois-ci le Français avait répondu positivement. Toutefois, les rumeurs prirent vite fin, Vergne ne souhaitant pas retourner dans la firme italienne. Celui-ci veut jouer dans une équipe capable d’être aux avant-postes, comme Red Bull. Une envie justifiée par ses accomplissements en FE. Cependant, est-ce vraiment possible ? Alors que les académies des top teams sont déjà bouchées, et que les pilotes actuels se pressent pour trouver un meilleur volant, les chances de voir une écurie rappeller JEV semblent bien minces. En janvier, le Francilien comparait un pilote de F1 à un robot : l’avenir du pilote semble se tourner vers l’électrique. La tendance serait même à l’inverse, puisque JEV invitait récemment Lewis Hamilton à rejoindre la FE. Une offre déclinée : les champions devraient rester dans leur catégorie respective.

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