Depuis plus d'un mois, révélations et rebondissements se succèdent dans une histoire complexe. Le point sur les cinq procédures judiciaires en cours.
1. Plainte pour abus de faiblesse
C'est le point de départ de toute l'affaire : en 2007, la fille de Liliane Bettencourt, Françoise, porte plainte contre François-Marie Banier pour "abus de faiblesse". Au bout de trois ans de procédure, Mme Bettencourt et sa fille mettent un terme à la bataille judiciaire qu'elles avaient engagée l'une contre l'autre en annonçant, lundi 6 décembre, leur réconciliation.
Les deux citations directes pour abus de faiblesse sur Liliane Bettencourt, la première visant exclusivement le photographe François-Marie Banier et la deuxième élargissant les poursuites au gestionnaire de fortune Patrice de Maistre et à l'avocat fiscaliste Fabrice Goguel, vont donc s'éteindre ainsi que la demande de mise sous tutelle.
Grâce à ces accords, Liliane Bettencourt "sera libre de toute entrave", a annoncé l'avocat de sa fille, Me Olivier Metzner. Quant à François-Marie Banier et Patrice de Maistre, ils "disparaissent de son entourage", a assuré Me Metzner.
2. Enquêtes préliminaires pour "atteinte à la vie privée", "vol et abus de confiance"
Autre affaire, celle des écoutes réalisées au domicile de Liliane Bettencourt par un majordome. Durant près d'un an, celui-ci a enregistré des conversations, notamment entre l'héritière de L'Oréal et son gestionnaire de fortune, Patrice de Maistre. Le contenu de ces vingt et une heures d'enregistrement, numérisées par un informaticien – l'époux de l'ancienne comptable de Liliane Bettencourt, Claire Thibout –, a été repris par la presse. Le Point, et surtout Mediapart, ont publié de larges extraits de ces enregistrements, qui montrent l'état de faiblesse de Liliane Bettencourt, mais aussi des liens troubles entre cette dernière et des responsables de l'UMP, au premier rang desquels Eric Woerth.
Le majordome à l'origine des enregistrements a été entendu par le procureur Courroye au cours d'une garde à vue, de même que Claire Thibout et son mari. L'ex-comptable fait l'objet d'une plainte pour "vol et abus de confiance" de la part de Liliane Bettencourt, qui l'accuse d'être partie avec des documents confidentiels. Selon les révélations du Canard enchaîné daté du 21 juillet, Claire Thibout aurait par ailleurs reçu 400 000 euros de Françoise Bettencourt-Meyers. Une somme promise par André Bettencourt, feu le mari de Liliane, pour remercier son employée, selon une lettre datant de 2007 et produite par les avocats de Claire Thibout. Reste que le versement d'une telle somme d'argent pose des questions quant à l'objectivité de son témoignage. L'ex-comptable maintient tout de même ses accusations.
3. Enquête préliminaire pour "financement illégal de parti politique ou de campagne électorale"
Les révélations des enregistrements concernant le financement d'activités politiques sont confirmées par Claire Thibout, qui confesse à Mediapart avoir vu des hommes politiques défiler chez les Bettencourt pour y toucher de l'argent liquide. L'ex-comptable nomme Nicolas Sarkozy, avant de se rétracter. La comptable produit des livres de comptes faisant état d'importants retraits d'argent liquide, et affirme que Patrice de Maistre a remis une partie de ces sommes à Eric Woerth, trésorier de l'UMP. Autant d'accusations qui ont conduit Philippe Courroye à ouvrir une enquête préliminaire pour "financement illégal de parti politique ou de campagne électorale".
Eric Woerth, soutenu par l'UMP, s'est vivement défendu de ces accusations. Mais sa défense est fragilisée par une série de faits : les agendas de Patrice de Maistre et de Claire Thibout coïncident et montrent que le ministre a rencontré à plusieurs reprises Patrice de Maistre, qu'il affirmait pourtant ne pas connaître. Quant à M. de Maistre, il convient avoir vu plusieurs fois le ministre, mais nie toute remise d'argent. L'audition d'Eric Woerth, qui quittera le 30 juillet son poste de trésorier du parti présidentiel, pourrait apporter des réponses sur ce point.
4. Enquête préliminaire pour "trafic d'influence" et "blanchiment de fraude fiscale"
Autre accusation à l'encontre d'Eric Woerth : celle d'être intervenu pour faire embaucher son épouse, Florence, au sein de Clymène, la structure qui gère les fonds de Liliane Bettencourt, en échange de faveurs. Les enregistrements pirates font état de plusieurs conversations entre Mme Bettencourt et M. de Maistre sur ce point.
L'épouse du ministre du travail, qui niait avoir eu connaissance de toute fraude fiscale, a annoncé sa démission de Clymène fin juin, reconnaissant un "conflit d'intérêts", mais expliquant son départ par sa mésentente avec Patrice de Maistre. Elle a été entendue par la brigade financière le 21 juillet, continuant à nier tout conflit d'intérêts entre son embauche et les fonctions de son mari, qui était alors ministre du budget.
Plus grave pour M. Woerth : le 9 juillet, le parquet de Nanterre a ouvert une enquête préliminaire à son encontre pour "blanchiment de fraude fiscale". Eric Woerth est accusé d'avoir fermé les yeux sur certaines activités illicites de Liliane Bettencourt lorsqu'il était au budget. Un rapport de l'Inspection générale des finances a dédouané le ministre, expliquant qu'il n'était pas intervenu dans le dossier de la milliardaire, mais sans lever totalement le doute.
5. Enquête préliminaire pour "abus de bien sociaux"
La plainte émane cette fois d'un simple "petit porteur" de L'Oréal, qui la dépose contre X... pour "abus de bien sociaux". Il accuse l'entreprise d'avoir offert au photographe et ami de Liliane Bettencourt un contrat de travail de complaisance, pour 4 millions d'euros.
Pour en savoir plus :
- Les protagonistes de l'affaire : un "organigramme" réalisé par Le Monde.fr
- Une chronologie des derniers rebondissements sur le site du Parisien
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