DANSE«Légende d’amour» en direct du Bolchoï: «Toutes les petites filles russes rêvent d'être ballerine»

«Légende d’amour» en direct du Bolchoï: «Toutes les petites filles russes rêvent d'être ballerine»

DANSELe ballet du Bolchoï «Légende d’amour» est présenté ce dimanche en direct de Moscou à 16h dans 130 salles de cinéma françaises, et dans le monde entier…
Légende d'amour, au théâtre du Bolchoï, le 24 octobre 2014
Légende d'amour, au théâtre du Bolchoï, le 24 octobre 2014 - Damir Yusupov
Annabelle Laurent

Annabelle Laurent

De notre envoyée spéciale à Moscou

Manteaux de fourrure et escarpins vernis par -5 degrés. A cinq minutes du spectacle, samedi soir, les retardataires se précipitaient encore à l’intérieur du bâtiment aux huit colonnes flambant neuf, sans un regard pour les revendeurs de billets au marché noir. Après dix ans d’absence à Moscou et une première acclamée jeudi soir, Légende d’amour, l’une des premières œuvres du maître russe Iouri Grigorovitch, 87 ans, affiche complet depuis plusieurs semaines.

Dimanche, le public des 250 danseurs du ballet du Bolchoï s’élargit… Le spectacle est diffusé en live par satellite en France (à 16h dans 130 salles), partout en Europe, aux Etats-Unis, et en différé en Amérique du Sud et en Asie. Mais une mauvaise nouvelle vient de tomber: malade, la danseuse étoile Svetlana Zakharova sera remplacée. «Elle doit être dévastée… Cela prouve bien qu’on est dans les conditions du direct», se désole François Duplat, fondateur de Bel Air Média, qui capte depuis 10 ans les spectacles du Bolchoï, et en direct avec Pathé Live depuis 2009. Entretien.

Comment sont nées les captations du Bolchoï?
On a commencé en 2003 avec La fille du Pharaon, du Français Pierre Lacotte. Je le connais bien et c'est lui qui m'a convaincu d'essayer. Ça a marché tout de suite, parce que dans le monde entier, quand on pense danse classique, on pense Bolchoï et Opéra de Paris. Le renouveau du ballet classique est venu de Russie. Le ballet de l’Opéra de Paris a été très longtemps dirigé par un ukrainien, Serge Lifar [maître de ballet jusqu’en 1958]. Tous les grands ballets, Le Lac Des Cygnes, Casse-noisettes, ont été créés en Russie…

Qu’est ce qui fait la singularité du ballet du Bolchoï par rapport à celui de l’Opéra de Paris?
Le Bolchoï a des accents plus dramatiques. L’école française est plus académique et stricte. Le Bolchoï est aussi plus athlétique comparé au Mariinsky, le ballet de St Pétersbourg. Mais comme pour Paris, tous les danseurs viennent de la même école, du même moule, et c’est évident quand on les voit sur scène. Les danseurs, ce sont des fous furieux: ils enchaînent entraînements et répétitions de 9h de matin à minuit, ça n’arrête jamais.

Qui, à Moscou, vient voir les ballets du Bolchoï?
Tout le monde! Enfin... tout le monde peut venir. Du temps de l’URSS, le public était surtout composé de comités d’entreprise, d'ouvriers méritants, ou de touristes qui payaient au marché noir très cher des places qui ne valaient pas un sou. C’était un théâtre assez politique, dont l’accès était difficile, mais pas du fait du prix. C’est différent aujourd’hui, avec un public traditionnel et certaines places très chères, beaucoup plus qu’à l’Opéra de Paris. Cela reste quelque chose d’exceptionnel. C’est le rêve de tout russe d’aller au moins une fois dans sa vie voir le spectacle.

Les étoiles comme Svetlana Sakharova sont-elles connues du grand public ?
Oh oui, ce sont des vraies stars. Sakharova a des contrats avec une grande maison de montres suisses, il y a une émission de télé dédiée, etc. Les étoiles sont suivies dans leur carrière. L’Américain David Hallberg [le premier danseur étranger à être devenu étoile en 2011] est une vraie star. Ici, le Bolchoï fait partie de la vie de tous les jours. Toutes les petites filles russes rêvent d’être ballerine. Comme à une époque, où en France une nomination d’étoile était annoncée au JT de 20h…

Les danseurs ont-ils apprivoisé les caméras? Comment vivent-ils les captations?
Ils sont très ouverts et ils ont compris que c’était dans leur intérêt de nous accueillir. On les connaît tous. Dans les coulisses, on a un moniteur, ils viennent nous voir. Ils ne sont pas blasés, et même Sakharova est exquise. Mais, maintenant que c’est diffusé dans le monde entier -au début il n'y avait que 80 cinémas - ils ont un peu peur. Cela dit, ils ne se comportent pas différemment, ils ne peuvent pas. Au contraire je trouve que ça les motive, j’ai même l’impression que c’est lors des captations qu'ils dansent le mieux.

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