Au petit matin, des artistes, des militants de la Coordination des intermittents et précaires (CIP) ou de syndicats du spectacle se retrouvent au métro Stalingrad, à Paris. Direction le Parc de la Villette, objectif l'occupation de la Philharmonie et le blocage de l'accès au chantier. Une comédienne et metteure en scène, qui participait à l'action, raconte.
« Un petit groupe a escaladé une grille, puis a pris un escalier métallique pour atteindre, enfin, le sommet du chantier. » Avec un autre groupe, la jeune femme est restée aux abords pour entrer en contact les ouvriers du chantier, pour la plupart des intérimaires. « Nous leur avons parlé de la réforme de l'annexe 4 des intérimaires, dans l'accord du 22 mars. L'annexe 4 n'est plus qu'une coquille vide, mais la plupart n'étaient pas au courant. Certains ne parlaient pas un mot de français. Leur chef leur a dit de rentrer dans les baraquements du chantier. Ils ont été déplacés sur d'autres chantiers, d'autres ont été renvoyés chez eux », poursuit-elle.
UNE CHALEUR TERRIBLE SUR LE TOIT
La police est arrivée vers 8 h 30 : « Nous étions dans l'enceinte du chantier, la police nous en a fait sortir sous les lacrymos. Mais nous sommes restés sur place, sous les préfabriqués ». Des salariés de la Cité de la Musique sont venus, en signe de solidarité, avant leur propre assemblée générale. « A un moment, il faisait une chaleur terrible sur le toit. Perchés tout là-haut, les occupants avaient soif. La chef de la police a refusé. Ils n'ont qu'à descendre, a-t-elle dit », ajoute encore la comédienne.
Et alors… un cheminot est arrivé ! « Il a escaladé la façade pour leur apporter de quoi se désaltérer. » Marc Slyper, du syndicat des artistes musiciens de la CGT, précise que « le conseiller social d'Aurélie Filippetti est venu pour négocier avec la police, afin que l'occupation du toit du chantier dure jusqu'à notre assemblée générale de 18 h 30 ».
Réveil matinal, aussi, pour Jean-Patrick Gille, le député socialiste chargé d'apaiser le conflit. A 7 h 50, au micro de France Inter, il commence par dérouler le menu du jour. Le matin, rencontre avec l'ensemble des partenaires sociaux. Ensuite, rendez-vous avec « la nébuleuse des intermittents en colère », c'est-à-dire le comité de suivi comprenant des parlementaires, des membres de la Coordination, des syndicalistes, etc.
LA RÉUNIONITE DURE DEPUIS ONZE ANS
Clara Dupont-Monod tente d'en savoir plus sur son scénario de sortie de crise. L'argent n'est pas le cœur du problème, explique le député : « Les intermittents voudraient moins d'insécurité. » Un retour aux 507 heures en douze mois ? Interroge la journaliste. « C'est un des sujets posés sur la table. Il faut arriver à ce que tout le monde soit prêt éventuellement à le discuter, l'expertiser. Et est-ce qu'il ne faut pas bâtir un autre système, un peu différent ? Certains le pensent aussi. » « Merci Jean-Patrick Gille et bon courage »…
Plus tard dans la journée, devant la « nébuleuse en colère », le député évoque une réunion à Matignon qui rassemblerait tous les protagonistes. L'accueil n'est pas follement enthousiaste, selon un participant. Quelqu'un fait remarquer que la réunionnite dure depuis onze ans, lorsque le protocole du 26 juin 2003 avait déclenché la crise des intermittents et l'annulation des festivals d'été. Oui à la réunion, disent-ils, à condition qu'au final, l'accord ne soit pas agréé. Ça bloque toujours…
LES LOCAUX DU « OFF » ENVAHIS
A Avignon, à deux semaines et deux jours de l'ouverture du festival, vendredi 4 juillet, l'inquiétude monte. Dans un communiqué, mardi 17 juin, le conseil d'administration du « in » « exprime son plein soutien aux salariés intermittents ». Suit une déclaration solennelle : « Il est vital que l'édition 2014 ait lieu. Les conséquences d'une éventuelle annulation pour le festival, les salariés, les spectateurs et l'ensemble de l'environnement, économique, politique, social et culturel sur le territoire seraient désastreuses pour 2014 mais aussi pour les éditions suivantes », indique le CA, dans le droit fil des dernières déclarations d'Olivier Py.
« Le conseil d'administration et ses membres mettront tout en œuvre pour convaincre les différents partenaires d'indispensables négociations », lit-on encore. De leur côté, les militants de la Coordination avignonnaise ont envahi les locaux du « off », pour protester contre son opposition à la grève, inscrite en substance dans un communiqué daté du 12 juin – essentiellement pour des raisons économiques.
Tout en indiquant qu'il « comprend l'inquiétude des intermittents du spectacle, et se déclare solidaire du mouvement », le festival ajoutait qu'il allait « poursuivre toutes les démarches entreprises » pour assurer le bon déroulement du off en 2014. « Suite à notre occupation du off, Greg Germain va envoyer un courrier à François Rebsamen », nous a déclaré un membre de la Coordination.
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