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Négociation télétravail : des discussions jugées "laborieuses"

Si les partenaires sociaux ont pu entrer, mardi, dans le vif du sujet, avec un plan d’accord proposé par le patronat, ils sont restés sur leur faim : cette séance a surtout permis de constater les nombreux désaccords. Une prochaine séance est programmée demain.

Un chemin escarpé… La séance de négociations interprofessionnelles sur le télétravail qui s’est déroulée mardi n’a pas permis de faire de franches avancées. Au point où les organisations syndicales s’inquiètent de la volonté du camp patronal de conclure un accord ad hoc. L’objet du courroux ? La difficulté d’intégrer de nouveaux éléments normatifs pour encadrer ce mode de travail. De nombreuses revendications avancées par les organisations syndicales sont restées pour l’heure lettre morte. L’identification conjointe par les dirigeants et les représentants des salariés des postes éligibles au télétravail, revendiquée par la CFDT ? C’est non. La négociation plutôt que l’élaboration d’une charte ? C’est encore non. Le droit au retour à un poste sans télétravail, non pas à un job à compétences équivalentes mais au même poste de travail ? Là encore, le Medef rechigne. Cette réunion n’a pas permis de discuter du fond.

"Aller au-delà du cadre législatif"

"Ce matin, on a exprimé nos revendications sur tous les chapitres [du document patronal transmis lundi aux partenaires sociaux]. Le patronat a réagi à chaud avec beaucoup de non, a insisté Béatrice Clicq, en charge de la négociation à la direction de Force ouvrière. Cet ANI doit permettre d’aller au-delà du cadre législatif. Les ordonnances permettent de mettre en place le télétravail par accord, via une charte ou le gré à gré (…). Il ne faut pas remettre en cause ces trois principes mais décider que la négociation soit la première porte d’entrée".

Catherine Pinchaut, secrétaire nationale de la CFDT, ne dit pas autre chose. "La partie patronale campe toujours sur la même position, un accord ni normatif, ni prescriptif. La période actuelle montre pourtant qu’il y a un besoin de cadrage".

Au final, "le texte patronal brille par l’absence de nouvelles propositions sur l’ensemble des sujets qui devraient faire l’objet de la négociation, résume Fabrice Angei, secrétaire confédéral de la CGT : la clarification des règles juridiques pour le télétravail régulier et/ou occasionnel ; l’organisation du temps de travail ; le droit à la déconnexion ; la protection des données personnelles ; la mobilité et les différents lieux d’exercice du télétravail ; le management et les relations basées sur la confiance".

"Volonté d’avancer"

A ce stade, personne ne souhaite pourtant quitter les négociations. "On y va avec la volonté d’avancer mais sans quitter le ring au premier round pour ne pas laisser l’arbitre siffler la fin du match", a indiqué Béatrice Clicq, satisfaite malgré tout de l’ouverture de telles négociations, réclamées depuis 2017, date de la signature du document de synthèse paraphé par l’ensemble des organisations syndicales. La CFDT se montre, elle, plus circonspecte. "Si aucune ouverture, ni point d’atterrissage, ni consensus ne se dégagent, ça ne servira à rien d’aller plus loin", constate Catherine Pinchaut.  

Pour déminer le sujet, la CGT va proposer une séance intersyndicale avant la prochaine séance de négociation, programmée le vendredi 13 novembre.

Nouveau projet d’ANI

Le patronat infléchira-t-il ses positions ? Le Medef devrait transmettre aux partenaires sociaux un nouveau projet d’ANI aujourd’hui. Il devrait se décliner, comme la première version, en sept chapitres : le télétravail dans l’entreprise et ses impacts sur son écosystème ; la mise en place du télétravail ; l’organisation du télétravail ; l’accompagnement des collaborateurs et des mesures ; la préservation de la relation de travail avec le salarié ; la continuité du dialogue social et de proximité. Un zoom spécifique sera consacré au télétravail en cas de force majeure et au cours de situations exceptionnelles. Mais il ne devrait pas reprendre l’introduction systématique d’accords d’entreprise avant la mise en place du télétravail et l’obligation de l’inscrire dans les NAO; une proposition jugée "excessive". De même, sur la question de l’éligibilité des postes, Hubert Mongon, le chef de file du Medef, a réaffirmé "que l’identification des missions télétravaillables doit rester la prérogative du chef d’entreprise en fonction des intérêts de l’entreprise".

Trois séances sont programmées, le 13, le 17 et le 23 novembre. Cette dernière étant censée aboutir à un accord national interprofessionnel (ANI) incluant les trois types de télétravail : ordinaire, occasionnel et exceptionnel, c’est-à-dire exercé également dans le cadre d’une pandémie.

Anne Bariet
Ecrit par
Anne Bariet