Les tendinopathies de la coiffe des rotateurs sont des pathologies fréquentes. Elles peuvent être d’origine traumatique (lésion sportive brutale) ou dégénératives (conflit sous-acromiale). Cette dégénérescence peut être considérée comme « physiologique ». En effet, on remarque que dans la population, près de 80% des personnes de plus de 80 ans présente une rupture de coiffe.

A travers cet article, nous allons vous expliquer comment rééduquer une épaule par électrothérapie suite à une rupture de la coiffe des rotateurs.

 

ANATOMIE FONCTIONNELLE ET PHYSIOPATHOLOGIE

Rappel anatomique

La coiffe des rotateurs est composée de 4 muscles : le supra épineux, le subscapulaire, l’infra épineux et le teres minor (petit rond).

Cet ensemble musculaire permet la mobilisation de l’épaule en rotation, élévation antérieure et en abduction. La synergie musculaire optimale assure un centrage parfait de la tête humérale dans la glène humérale.

Remarque anatomique importante, le biceps constitué de deux chefs (long et court) ne fait pas partie de la coiffe des rotateurs mais de par sa proximité anatomique, il est fréquemment assimilé à cette pathologie.

 

Rappel physio-pathologique 

Dans la majorité des cas, le tendon le plus fréquemment touché est le supra épineux. Plusieurs stades cliniques sont à noter : tendinopathie simple, compliquée d’une rupture transfixiante ou partielle, superficielle, intratendineuse ou profonde.

Le motif de consultation est souvent la douleur, symptôme présent quasi systématiquement. Les patients se plaignent d’un arc douloureux situé entre 60° et 90° lors de l’élévation.

Afin de déterminer la ou les lésions tendineuses, un examen clinique précis sera nécessaire. Si besoin, il faudra le compléter par une imagerie (radiographie ou échographie).

La qualité de cet examen permettra de définir un traitement adéquat et adapté à la lésion.

 

TRAITEMENT 

Les tendinopathies simples sont traitées médicalement en associant une médication antalgique à une rééducation donnant de très bons résultats. En cas de lésion compliquée (rupture) et si le traitement médical échoue, on peut envisager l’intervention chirurgicale par réparation du tendon rompu.

Actuellement, près de 10% des lésions dégénératives sont opérées.

 

Objectifs de la rééducation associée à l’électrostimulation

L’atteinte du tendon du supra épineux va entrainer une perte de force musculaire. Cette amyotrophie engendre un déséquilibre articulaire, la tête humérale se décentre et se positionne en haut et en rotation interne sous l’effet du deltoïde. C’est le classique conflit antéro-supérieur.

Les techniques manuelles de recentrage doivent être accompagnées par un renforcement de l’appareil musculaire afin de restabiliser l’épaule et de retrouver un bon geste fonctionnel.

L’électrostimulation va nous permettre d’accélérer la récupération musculaire, d’autant plus intéressante si elle est associée aux exercices volontaires.

 

Quels muscles choisir ?

La lutte contre le glissement antéro-supérieur, nous oblige à choisir la stimulation en priorité de l’infra épineux (principal rotateur externe), du supra épineux (coaptateur de la tête humérale) mais aussi des fixateurs de la scapula (rhomboïde).

On ne peut faire un geste précis sur la partie distale d’un membre que si la racine proximale de ce membre est forte et stable.

Il est possible en électrostimulation de faire deux types de montage :

  • soit intervenir sur la coiffe directement (photo A)
  • soit sur l’ensemble des groupes musculaires (photo B)

 

Règles pratiques

Choix du programme 

Il existe de nombreux programmes en électrostimulation, le principal objectif étant de déterminer le type de renforcement que l’on souhaite appliquer aux muscles.

On peut choisir soit de faire un travail de la fibre lente afin d’assurer une reprise du volume musculaire et de retrouver une bonne stabilité articulaire, soit de solliciter la fibre rapide pour gagner en force musculaire.

Dans notre cas précis, il faut chercher à améliorer la stabilité et par conséquent, de choisir un programme qui visera la stimulation de la fibre lente.

On utilisera le programme AMYOTROPHIE dont voici les principales caractéristiques :

On remarque que le temps de repos est égal au temps de travail, la fibre lente est une fibre endurante qui peut supporter aisément de telles charges de travail.

Autre remarque, la fréquence de stimulation est autour de 33 Hz ce qui provoque la contraction tétanique maximale de cette fibre et assure ainsi un régime de travail adapté et optimal.

On notera qu’entre deux contractions, on trouve une phase à 4 Hz, phase vasculaire qui permet aux muscles stimulés de se reposer et d’éliminer les déchets organiques liés à la contraction.

La durée de la stimulation est de 20mn (10mn de contractions cumulées).

Il existe deux niveaux dans ce programme (les fréquences de stimulation sont différentes).

 

Placement des électrodes 

Pour obtenir une contraction de qualité, il faut comme dans toute stimulation neuro-musculaire rechercher le point moteur du ou des muscles cibles.

Le point moteur est la zone musculaire de la plaque motrice (innervation). En appliquant l’électrode à ce niveau, on obtiendra une stimulation plus efficace.

En électrostimulation neuro-musculaire, chaque canal présente deux pôles, un dit « positif », l’autre dit « négatif ».

Le pôle positif étant plus excitateur que le pôle négatif, il est impératif de positionner le pôle positif sur le point moteur du muscle cible. Le pôle négatif étant placé à l’extrémité du muscle.

ATTENTION ! Cette règle habituelle ne s’applique pas exactement comme cela pour le montage de l’épaule.

Le pôle positif sera positionné sur le point moteur de l’infra épineux alors que le pôle négatif sera posé sur la partie distale du supra épineux.

Pourquoi ? Parce que l’infra épineux est le principal rotateur externe et qu’il est donc correcteur du positionnement interne de la glène humérale. Voir schéma ci-dessous :

Comme expliqué dans la première partie de l’article, il est possible d’associer une stimulation du rhomboïde afin d’améliorer la stabilité de la scapula.

Précision : le montage en filaire est exactement le même.

 

Réglage des intensités 

La règle importante concernant l’intensité est d’augmenter régulièrement non seulement pendant la séance mais aussi au cours des séances. Plus l’intensité sera forte, plus le nombre de fibres stimulées sera important. Si après 3 ou 4 séances le patient ne supporte pas l’augmentation et ne progresse pas, il faut arrêter le traitement en électrostimulation.

En clair, il faut augmenter jusqu’au maximum supportable.

Le réglage de l’intensité se fait pendant la phase de contraction décrite précédemment.

A noter que pendant la phase de repos, les secousses (4 Hz) doivent être bien visibles afin d’assurer l’hyperhémie nécessaire post-contraction.

 

Position du patient

Variable en fonction du stade et de l’évolution du traitement. Si les premières séances se font plutôt en position assise, membre en position basse, il est vite nécessaire de modifier la position du membre supérieur en élévation antérieure par exemple et par la suite d’y associer un mouvement volontaire combiné à la stimulation électro-induite. Voir schémas ci-dessous :

Fréquence du traitement 

1

(10 séances)

 

Programme : AMYOTROPHIE Niveau 1

Fréquence : minimun 2 séances par semaine, idéalement 3.

Objectif n°1 : diminuer la douleur

On peut aisément faire de la TENS associée à la stimulation. La TENS est représentée par la pose des deux grandes électrodes qui encadrent le montage.

Remarque importante : les outils technologiques de la division Rééducation de DJO France nous permettent de réaliser simultanément ce type de montage. TENS + STIMULATION :

Objectif n°2 : assurer le recentrage articulaire de la tête humérale dans la glène.

Le patient prend conscience de la coaptation active. On peut d’ailleurs lui demander de contracter simultanément les muscles de l’épaule.

Au cours de cette phase, l’épaule est plutôt en position basse avec une rotation neutre.

2

(10 séances)

 

Programme : AMYOTROPHIE Niveau 2

Fréquence : au moins deux séances par semaine

Objectif : la principale différence entre les deux phases est la position articulaire du membre supérieur. On cherche absolument à faire une reprogrammation neuro-motrice en combinant travail volontaire et travail électro-induit.

Cette combinaison se présente sous forme de gestes fonctionnels quotidiens puis de gestes plus techniques si besoin (sport).

L’électrostimulation ne doit pas faire oublier la présence du kinésithérapeute afin de contrôler la bonne synergie musculaire et articulaire.

 

Nouvelles technologies et fonctions avancées 

Pendant de très nombreuses années, l’électrostimulation neuro-musculaire (ESNM) a été utilisée par les kinésithérapeutes comme un simple adjuvant à la rééducation. Le patient était placé dans une salle et subissait passivement le rythme des contractions / repos imposé par la machine. L’avancée technologique des appareils de la division Rééducation de DJO France (fonctions Mi, technologie sans fil) et les études (Cometti - Dijon) ont permis d’impliquer le patient dans sa rééducation et de démontrer l’intérêt du travail associé à l’ESNM.

 

CONCLUSION 

Les nouvelles orientations appliquées à l’électrostimulation passent par une forte présence du kinésithérapeute auprès de son patient afin de créer un tandem dynamique, de développer le capital confiance et d’améliorer ainsi le résultat final.

Ce qu’il faut retenir :

  • Stimulation de l’infra épineux à prioriser
  • Travail de la stabilité avec le programme Amyotrophie
  • Position du patient variable
  • Travail volontaire associé
  • Surveillance du kiné

La douleur est un signe qu’il ne faut pas négliger. Si cette dernière est prononcée et/ou perdure trop longtemps, il est conseillé de consulter un médecin.

Pour plus d’informations sur les solutions thérapeutiques proposées, cliquez ICI.

www.chattanoogarehab.fr

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Auteur : Thierry SERENARI, Kinésithérapeute du Sport (Versailles)

Consultant Chattanooga/DJO pour l’Electrothérapie.

Sources / Illustrations : DJO France

Bibliographie :
  • The effect of neuromuscular electrical stimultation of the infraspinatus on shoulder external rotation force production after rotator cuff repair surgery – Am J Sports Med 2008 Dec.; 36(12):2317-21 - Dec. 2008 -Massachusetts General Hospital Sports medicine Service, Boston, MA, USA
  • Combined application of neuromuscular electrical stimulation and voluntary muscular contractions – Thierry Paillard – Sports Med 2008; 38 (2),pp. 161-177 – 2008 – Laboratoire d’Analyse de la Performance Sportive, Département STAPS, Université de Pau et des Pays de l’Adour, Tarbes, France
  • Electrical stimulation superimposed onto voluntary muscular contraction - Paillard T, Noé F, Passelergue P, Dupui P. – Sports Med 2005; 35(11):951-66 - 2005
  • Superimposed electrical stimulation comfortably improves the endurance of maximal voluntary contractions – Boisgontier MP, Moineau B, Nougier V – J Sports Med Phys Fitness. 2012 Oct; 52(5):558-62 – Oct 2012 – UJF Grenoble, Grenoble, France