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Quartiers prioritaires : le "1% solidarité" acté par le Premier ministre

Pour soutenir spécifiquement les "territoires en décrochage" fragilisés encore davantage par la crise sanitaire et économique, le Premier ministre a donné son feu vert ce 23 novembre à l’idée de réserver 1 milliard d’euros du plan de relance à ces quartiers. Reste à se mettre d’accord sur les domaines à privilégier, et surtout sur les modalités de suivi de cette annonce. Les maires de banlieues entendent être "à la manœuvre".      

Suite à l’"appel au secours" des élus de villes populaires adressé le 14 novembre 2020 au président de la République (voir notre article), le Premier ministre, Jean Castex, s’est engagé ce 23 novembre à réserver 1% des 100 milliards d'euros du plan de relance aux quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Ce "1% solidarité" sera fléché vers l'insertion et l'emploi, le secteur associatif, l'éducation, le renouvellement urbain, la mobilité, les commerces de proximité, a énuméré Nadia Hai, ministre déléguée chargée de la ville, à l’issue de la visioconférence entre des maires, le Premier ministre et cinq autres membres du gouvernement. 

1 milliard d’euros à suivre de près 

Si l’accueil favorable de cette proposition est une "bonne nouvelle", les élus de banlieue considèrent que "tout reste à faire", a expliqué Guillaume Delbar, maire de Roubaix, lors d’une visioconférence de presse tenue juste après la réunion. En effet, si le montant global de 1 milliard d’euros a fait l’objet d’un accord, les propositions formulées par les maires dans chacun des domaines abordés (éducation / emploi des jeunes, associations, sécurité, santé / social, économie sociale et solidaire / insertion, rénovation, finances, sport) n’auraient pas suscité la même adhésion chez les ministres concernés. Généralisation des cités éducatives dans les QPV, renforcement des moyens humains en quartier de reconquête républicaine, compensation des "dépenses Covid", soutien aux associations caritatives, culturelles et sportives, création de 100.000 à 150.000 parcours emploi-compétences (PEC) au profit des jeunes… "Nous voulons que les choses soient inscrites très concrètement dans la loi de finances", a indiqué Philippe Rio, maire de Grigny.

Alors que le gouvernement aurait fait valoir les moyens déjà mobilisables, notamment au bénéfice de la formation et de l’emploi des jeunes, il serait ouvert à la "discussion" sur des besoins complémentaires, a assuré Nadia Hai. Habitués aux grandes annonces qui sont de leur point de vue souvent peu suivies d’effets, les élus se disent cette fois déterminés à s’assurer que ce milliard d’euros "retombe bien sur le terrain".  Avec les quelque 180 élus et les responsables associatifs parties prenantes de l’appel, ils proposent donc de se réunir une fois par mois dans un "Conseil national des solutions" pour s’assurer du bon acheminement des moyens promis. 

Aux niveaux local et national, changer de méthode pour "accélérer"

Cette préoccupation de "lisibilité", de "transparence" et d’effectivité des moyens déployés, Nadia Hai a dit la partager. La secrétaire d’État a toutefois considéré qu’il y avait déjà un Conseil national des villes (CNV), ce qui ne justifiait pas la création d’un nouveau Conseil. Hélène Geoffroy, maire de Vaulx-en-Velin et ancienne secrétaire d’État à la politique de la ville, siégeant au CNV, a témoigné de la difficulté à traduire ce type d’annonces en moyens concrets sur le terrain, du fait notamment de l’interministérialité. "On peut être oublié dans de grandes politiques d'ensemble", a-t-elle estimé, plaidant pour "un plan d’ensemble pour nos quartiers politique de la ville". 

Au niveau local et dans un contexte d’urgence, "le diagnostic et la méthode des contrats de villes ne sont plus adaptés à la situation", a renchéri Philippe Rio. La méthode reste donc à préciser, alors que Frédéric Leturque, maire d’Arras, appelle à renouer avec l’idée de "plan d’action cœur de quartier" un temps évoqué au sommet de l’État. Les maires veulent en tout cas être à la manœuvre pour plus d’"efficacité", d’"agilité", mais aussi d’"équité" dans l’allocation et le suivi de ces nouveaux moyens. Pour Frédéric Leturque, alors que le décrochage de ces territoires urbains s’accentue, il importe d’"accélérer".