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Document 62021CJ0650

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 20 avril 2023.
FW et CE contre Landespolizeidirektion Niederösterreich et Finanzamt Österreich.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Verwaltungsgerichtshof.
Renvoi préjudiciel – Politique sociale – Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail – Directive 2000/78/CE – Interdiction des discriminations fondées sur l’âge – Rémunération des fonctionnaires – Réglementation nationale antérieure jugée discriminatoire – Classement dans un nouveau régime de rémunération effectué par référence à l’ancienneté fixée selon un régime antérieur de rémunération – Rectification de cette ancienneté par la fixation d’une date de référence de comparaison – Caractère discriminatoire du nouveau classement – Règle tendant à défavoriser les fonctionnaires âgés.
Affaire C-650/21.

Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2023:300

 ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

20 avril 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Politique sociale – Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail – Directive 2000/78/CE – Interdiction des discriminations fondées sur l’âge – Rémunération des fonctionnaires – Réglementation nationale antérieure jugée discriminatoire – Classement dans un nouveau régime de rémunération effectué par référence à l’ancienneté fixée selon un régime antérieur de rémunération – Rectification de cette ancienneté par la fixation d’une date de référence de comparaison – Caractère discriminatoire du nouveau classement – Règle tendant à défavoriser les fonctionnaires âgés »

Dans l’affaire C‑650/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche), par décision du 18 octobre 2021, parvenue à la Cour le 27 octobre 2021, dans la procédure

FW,

CE,

en présence de :

Landespolizeidirektion Niederösterreich,

Finanzamt Österreich,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de Mme A. Prechal, présidente de chambre, Mme M. L. Arastey Sahún (rapporteure), MM. F. Biltgen, N. Wahl et J. Passer, juges,

avocat général : M. J. Richard de la Tour,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour FW, par Me V. Treber-Müller, Rechtsanwältin,

pour CE, par Me M. Riedl, Rechtsanwalt,

pour le gouvernement autrichien, par M. A. Posch et Mme J. Schmoll, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. B.-R. Killmann et D. Martin, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 1er, 2 et 6 de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail (JO 2000, L 303, p. 16), lus en combinaison avec l’article 21 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre de litiges opposant FW et CE à la Landespolizeidirektion Niederösterreich (direction régionale de police de Basse-Autriche, Autriche) et au Finanzamt Österreich (administration fiscale, Autriche), anciennement Finanzamt Salzburg-Land (administration fiscale du Land de Salzbourg, Autriche) (ci-après, ensemble, l’« administration fiscale »), au sujet de la fixation de l’ancienneté de FW et de CE dans le barème de rémunération des fonctionnaires de l’État fédéral.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

L’article 1er de la directive 2000/78, intitulé « Objet », prévoit :

« La présente directive a pour objet d’établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, [le] handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, en ce qui concerne l’emploi et le travail, en vue de mettre en œuvre, dans les États membres, le principe de l’égalité de traitement. »

4

L’article 2 de cette directive, intitulé « Concept de discrimination », dispose :

« 1.   Aux fins de la présente directive, on entend par “principe de l’égalité de traitement” l’absence de toute discrimination directe ou indirecte, fondée sur un des motifs visés à l’article 1er.

2.   Aux fins du paragraphe 1 :

a)

une discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable, sur la base de l’un des motifs visés à l’article 1er ;

b)

une discrimination indirecte se produit lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une religion ou de convictions, d’un handicap, d’un âge ou d’une orientation sexuelle donnés, par rapport à d’autres personnes, à moins que :

i)

cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires, [...]

[...] »

5

L’article 3 de ladite directive, intitulé « Champ d’application », prévoit, à son paragraphe 1, sous c) :

« Dans les limites des compétences conférées à la Communauté, la présente directive s’applique à toutes les personnes, tant pour le secteur public que pour le secteur privé, y compris les organismes publics, en ce qui concerne :

[...]

c)

les conditions d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération ».

6

L’article 6 de la même directive, intitulé « Justification des différences de traitement fondées sur l’âge », est libellé comme suit :

« 1.   Nonobstant l’article 2, paragraphe 2, les États membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires.

[...]

2.   Nonobstant l’article 2, paragraphe 2, les États membres peuvent prévoir que ne constitue pas une discrimination fondée sur l’âge la fixation, pour les régimes professionnels de sécurité sociale, d’âges d’adhésion ou d’admissibilité aux prestations de retraite ou d’invalidité, y compris la fixation, pour ces régimes, d’âges différents pour des travailleurs ou des groupes ou catégories de travailleurs et l’utilisation, dans le cadre de ces régimes, de critères d’âge dans les calculs actuariels, à condition que cela ne se traduise pas par des discriminations fondées sur le sexe. »

7

L’article 16 de la directive 2000/78, intitulé « Conformité », dispose :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires afin que :

a)

soient supprimées les dispositions législatives, réglementaires et administratives contraires au principe de l’égalité de traitement ;

b)

soient ou puissent être déclarées nulles et non avenues ou soient modifiées les dispositions contraires au principe de l’égalité de traitement qui figurent dans les contrats ou les conventions collectives, dans les règlements intérieurs des entreprises, ainsi que dans les statuts des professions indépendantes et des organisations de travailleurs et d’employeurs. »

Le droit autrichien

8

Le droit autrichien en matière de rémunération et d’avancement des fonctionnaires de l’État fédéral a, en raison de la contrariété de certaines de ses dispositions avec le droit de l’Union, été modifié à de nombreuses reprises. Il ressort de la décision de renvoi que le nouveau régime de rémunération et d’avancement des fonctionnaires, issu des modifications législatives promulguées au cours des années 2019 et 2020, tend à mettre fin à une discrimination fondée sur l’âge qui résultait du régime de rémunération et d’avancement antérieurement en vigueur.

Le GehG de 2010

9

Dans le but de remédier à la discrimination fondée sur l’âge résultant de la version précédente du Gehaltsgesetz (loi sur les salaires), constatée par l’arrêt de la Cour du 18 juin 2009, Hütter (C‑88/08, EU:C:2009:381), l’article 8 du Gehaltsgesetz 1956 (loi sur les salaires de 1956, BGBl. 54/1956), telle que modifiée par la Bundesbesoldungsreform 2010 (loi fédérale de réforme des salaires de 2010, BGBl. I, 82/2010) (ci-après le « GehG de 2010 »), prévoyait, à son paragraphe 1 :

« L’avancement est déterminé en fonction d’une date de référence. Sauf disposition contraire dans le présent article, la période nécessaire à un avancement au deuxième échelon de chaque catégorie d’emploi est de cinq ans et de deux ans pour les autres échelons. »

10

L’article 12 du GehG de 2010 disposait :

« 1.   Sous réserve des restrictions énoncées aux paragraphes 4 à 8, la date de référence à prendre en considération pour l’avancement d’échelon se calcule en remontant dans le temps à partir du jour de l’engagement à raison de périodes postérieures au 30 juin de l’année durant laquelle neuf années scolaires ont été accomplies ou auraient été accomplies après l’admission dans le premier degré d’enseignement :

1)

les périodes énumérées au paragraphe 2 sont prises en considération en totalité ;

2)

les autres périodes

a)

qui remplissent les critères énoncés aux paragraphes 3 ou 3a, sont prises en considération en totalité ;

b)

qui ne remplissent pas les critères énoncés aux paragraphes 3 ou 3a

aa)

sont prises en considération dans leur totalité à raison de trois années et

bb)

sont prises en considération pour moitié à raison de trois années supplémentaires.

1a.   L’étendue des périodes auxquelles il a été remonté conformément au paragraphe 1, point 2, sous b), aa), et au paragraphe 2, point 6, et des périodes d’apprentissage auxquelles il a été remonté conformément au paragraphe 2, point 4, sous d), ne peut dépasser trois années au total. Néanmoins, lorsque

1)

une formation achevée conformément au paragraphe 2, point 6, a requis plus de douze niveaux scolaires au titre des dispositions de la législation scolaire, cette période est prorogée d’une année par niveau scolaire accompli au-delà du douzième ;

2)

un apprentissage achevé conformément au paragraphe 2, point 4, sous d), a requis plus de 36 mois d’apprentissage au titre des dispositions visées, cette période est prorogée d’un mois pour chaque mois de l’apprentissage accompli au‑delà de 36 mois.

[...] »

11

La fixation de la date de référence permettant de déterminer l’avancement d’un fonctionnaire et, partant, la position de celui-ci dans le barème de rémunération ne pouvait être opérée, conformément à l’article 113, paragraphes 10 et 11, du GehG de 2010, que sur demande, les dispositions précédentes restant par ailleurs applicables dans leur version en vigueur au 31 décembre 2003.

Le GehG de 2015

12

Dans le but de remédier à la discrimination fondée sur l’âge résultant du GehG de 2010 et constatée dans l’arrêt de la Cour du 11 novembre 2014, Schmitzer (C‑530/13, EU:C:2014:2359), le GehG de 2010 a été modifié avec effet rétroactif par la Bundesbesoldungsreform 2015 (loi fédérale de réforme des salaires de 2015, BGBl. I, 32/2015), par la Dienstrechts-Novelle 2015 (loi de 2015 modifiant le droit de la fonction publique, BGBl. I, 65/2015) et par le Besoldungsrechtsanpassungsgesetz (loi portant réforme des salaires de 2016, BGBl. I, 104/2016) (ci-après le « GehG de 2015 »).

13

L’article 8 du GehG de 2015, intitulé « Classement et avancement », prévoyait, à son paragraphe 1 :

« [...] Le classement et l’avancement ultérieur sont déterminés en fonction de l’ancienneté dans le barème de rémunération. »

14

Aux termes de l’article 12, paragraphe 1, du GehG de 2015, intitulé « Ancienneté dans le barème de rémunération » :

« L’ancienneté dans le barème de rémunération comprend la durée des périodes d’activité utiles pour l’avancement, augmentée de la durée des périodes antérieures éligibles. »

15

L’article 169c du GehG de 2015, qui concerne le reclassement des fonctionnaires en service dans le nouveau régime de rémunération et d’avancement, prévoyait :

« 1.   Tous les fonctionnaires des catégories de rémunération et d’emploi visés à l’article 169d, qui sont en service au 11 février 2015, seront reclassés, conformément aux dispositions suivantes et sur la seule base de leur rémunération antérieure, dans le nouveau régime de rémunération créé par la présente loi fédérale. Lors d’une première étape, les fonctionnaires seront classés, en raison de leur rémunération antérieure, à un échelon du nouveau régime de rémunération dans lequel la rémunération antérieure est maintenue. [...]

2.   Le transfert de la fonctionnaire ou du fonctionnaire dans le nouveau régime de rémunération s’effectue par le biais d’une fixation globale de son ancienneté dans le barème de rémunération. Le montant de transfert est déterminant pour la fixation globale. Le montant de transfert correspond à l’intégralité du traitement sans éventuel avancement exceptionnel, tel qu’il a servi à calculer la rémunération du fonctionnaire pour le mois de février 2015 (mois du transfert). [...]

2a.   Le montant à retenir en tant que montant de transfert est celui de l’échelon de salaire qui était effectivement déterminant pour la rémunération versée pour le mois du transfert (classement conformément au bulletin de salaire). Un examen de la régularité de la rémunération est exclu, tant en ce qui concerne son fondement que son montant. Une rectification ultérieure des rémunérations versées n’est à prendre en compte pour le calcul du montant de transfert que pour autant que

1)

cette rectification a pour objet des erreurs factuelles qui se sont produites à l’occasion de l’encodage des données dans un système automatique de traitement de l’information, et

2)

les données introduites par erreur divergent manifestement des données qui devaient être encodées, ainsi que le prouvent les documents déjà existants au moment de l’introduction.

[...]

3.   L’ancienneté dans le barème de rémunération du fonctionnaire reclassé est fixée sur la base de la période nécessaire pour avancer du premier échelon de salaire (à partir du premier jour) à l’échelon de traitement de la même catégorie d’emploi pour lequel est prévu le traitement inférieur le plus proche du montant de transfert dans la version en vigueur le 12 février 2015. Si le montant de transfert correspond au montant le plus bas d’un échelon de traitement dans la même catégorie d’emploi, cet échelon est alors retenu. Tous les montants à comparer doivent être arrondis à l’unité en euros la plus proche.

4.   L’ancienneté dans le barème de rémunération fixée au paragraphe 3 est majorée de la durée comprise entre la date du dernier passage à un traitement supérieur et l’expiration du mois de transfert dans la mesure où cette durée est utile pour l’avancement.

[...] »

16

Aux termes de l’article 175, paragraphe 79, point 3, du GehG de 2015, les articles 8 et 12 de ce dernier, y compris leurs intitulés, entrent en vigueur, dans la version du GehG de 2015, le lendemain du jour de la publication, à savoir le 12 février 2015, toutes les versions antérieures de ces articles ne pouvant plus être appliquées dans les procédures en cours ou dans les procédures futures.

Le GehG de 2020

17

Dans le but de remédier à la discrimination fondée sur l’âge résultant du GehG de 2015 et constatée dans les arrêts de la Cour du 8 mai 2019, Leitner (C‑396/17, ci-après l’ arrêt Leitner , EU:C:2019:375), et du 8 mai 2019, Österreichischer Gewerkschaftsbund (C‑24/17, EU:C:2019:373), le GehG de 2015 a été modifié par la 2. Dienstrechts-Novelle 2019 (deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique, BGBl. I, 58/2019) et la Dienstrechts-Novelle 2020 (loi de 2020 modifiant le droit de la fonction publique, BGBl. I, 153/2020) (ci‑après le « GehG de 2020 »).

18

Aux termes de l’article 169f du GehG de 2020 :

« 1.   Pour les fonctionnaires

1)

qui se trouvent en position d’activité le jour de la publication de la [deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique] et

2)

qui ont été transférés au titre de l’article 169c, paragraphe 1 (à la rigueur conjointement avec l’article 169d, paragraphes 3, 4 ou 6) et

3)

dont la première fixation de la date de référence de l’avancement pour l’engagement en cours s’est faite en excluant les périodes antérieures à l’âge de 18 ans et

4)

pour lesquels, après la première fixation visée au point 3 les périodes antérieures à l’âge de 18 ans n’ont pas été prises en compte selon les dispositions de la [loi fédérale de réforme des salaires de 2010] et n’ont eu absolument aucune incidence sur le classement du fait de ne pas avoir pris en compte l’allongement, opéré par cette loi fédérale, de la période nécessaire au premier avancement,

la position [dans le barème de rémunération] doit être d’office fixée à nouveau par décision.

[...]

3.   Lorsque des procédures pendantes au jour de la publication de la [deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique] ont principalement pour objet la question de la prise en compte de périodes de service antérieures supplémentaires, de la nouvelle fixation de la date de référence de l’avancement, en particulier au titre de l’article 113, paragraphe 10, dans la version de la [loi fédérale de réforme des salaires de 2010], de la nouvelle fixation de l’ancienneté dans le barème de rémunération ou de la fixation de la position [dans le barème de rémunération] d’une fonctionnaire ou d’un fonctionnaire au titre du paragraphe 1, point 3, la nouvelle fixation se fait dans le cadre de ces procédures. Dans les procédures pendantes au jour de la publication de la [deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique], dans lesquelles une telle question doit être tranchée à titre de question préalable, l’appréciation se fait sans préjudice de l’article 38 du Allgemeines Verwaltungsverfahrensgesetz 1991 [(code de procédure administrative, BGBl. 51/1991)], conformément à son paragraphe 6.

4.   La nouvelle fixation visée aux paragraphes 1 à 3 se fait, après avoir défini la date de référence de comparaison (article 169g), en fixant l’ancienneté dans le barème de rémunération au 28 février 2015. L’ancienneté dans le barème de rémunération visée à l’article 169c est augmentée de la période comprise entre la date de référence de comparaison et la date de référence de l’avancement lorsque la date de référence de comparaison est antérieure à la date de référence de l’avancement sinon elle est diminuée à concurrence de cette période. La comparaison se fait avec la dernière date de référence de l’avancement qui a été fixée en excluant les périodes antérieures à l’âge de 18 ans.

[...]

6.   La détermination des rémunérations se fait rétroactivement en prenant en compte la période de service qui a une incidence sur l’avancement

1)

dans le cas du paragraphe 4 (pour les périodes antérieures au 1er mars 2015 par application de l’article 169c, paragraphe 6b, dans la version en vigueur et de l’article 8 dans la version de la [loi de 2015 modifiant le droit de la fonction publique]), en fonction de l’ancienneté nouvellement fixée dans le barème de rémunération [...]

[...] »

19

L’article 169g du GehG de 2020 dispose :

« 1.   La date de référence de comparaison se calcule en sorte que les périodes antérieures accomplies après avoir atteint l’âge minimal requis pour travailler dans un système de formation en alternance visé à l’article 4, paragraphe 2, sous b), de la directive 94/33/CE du Conseil, du 22 juin 1994, relative à la protection des jeunes au travail (JO 1994, L 216, p. 12), qui devaient être prises en compte par anticipation dans le calcul de la date de référence de l’avancement ou qui auraient dû être prises en compte par anticipation en ignorant la limite d’âge de 18 ans, soient prises en compte en remontant avant le jour du recrutement conformément aux paragraphes 2 à 6.

2.   Les dispositions suivantes relatives à la date de référence de l’avancement seront appliquées dans le calcul de la date de référence de comparaison conformément aux paragraphes 3 à 6 :

1)

article 12 dans la version de la [2. Dienstrechts-Novelle 2007 (deuxième loi de 2007 modifiant le droit de la fonction publique, BGBl. I, 96/2007)],

2)

article 12a dans la version de la [Dienstrechts-Novelle 2011 (loi de 2011 modifiant le droit de la fonction publique, BGBl. I, 140/2011)],

3)

article 113 dans la version de la [Dienstrechts-Novelle 2004 (loi de 2004 modifiant le droit de la fonction publique, BGBl. I, 176/2004)],

4)

article 113a dans la version de la [Dienstrechts-Novelle 2007 (loi de 2007 modifiant le droit de la fonction publique, BGBl. I, 53/2007)], et

5)

l’annexe 1 dans la version de la [loi de 2004 modifiant le droit de la fonction publique].

Les dispositions déterminantes sont les dispositions relatives à la catégorie d’emploi à laquelle a appartenu la fonctionnaire ou le fonctionnaire au moment de la fixation de la date de référence de l’avancement visée à l’article 169f, paragraphe 4, dernière phrase.

3.   Par dérogation aux dispositions visées au paragraphe 2, points 1 à 5

1)

les périodes antérieures accomplies avant d’avoir atteint l’âge minimal requis pour travailler dans le cadre d’un système de formation en alternance visé à l’article 4, paragraphe 2, sous b), de la directive [94/33], se substituent aux périodes accomplies avant d’avoir atteint l’âge de 18 ans ;

2)

pour les fonctionnaires appartenant à des catégories d’emploi pour lesquelles les dispositions relatives à la date de référence de l’avancement prévoient de prendre en compte par anticipation les périodes d’études suivies et réussies dans une école supérieure, seront exclusivement prises en compte par anticipation comme périodes d’études suivies et réussies dans une école supérieure les périodes qui ont été accomplies

a)

entre le lendemain du 31 août de l’année civile dans laquelle la fonctionnaire ou le fonctionnaire a été admis dans le douzième niveau scolaire, et

b)

le lendemain du 30 juin de l’année civile suivante.

Lorsque les dispositions de la législation scolaire applicables à la fonctionnaire ou au fonctionnaire prévoient une durée des études de plus de douze années en principe, la période à prendre en compte par anticipation augmente d’une année par niveau scolaire supplémentaire ;

3)

avec l’accord de la ministre ou du ministre fédéral de l’Art, de la Culture, du Service public et du Sport, les périodes d’une activité professionnelle équivalente visée à l’article 12, paragraphe 2, point 1a, seront prises intégralement en compte, qui

a)

ont été accomplies avant d’avoir atteint l’âge de 18 ans ou

b)

ont été accomplies après avoir atteint l’âge de 18 ans lorsque la prise en compte des autres périodes par anticipation était légalement plafonnée dans l’intérêt public au sens de l’article 12, paragraphe 3, dans la version en vigueur à l’époque.

Dans le calcul d’une perte éventuelle lors d’un transfert, ces périodes sont assimilées à des périodes accomplies dans les liens d’un engagement par une collectivité territoriale autrichienne ;

4)

les autres périodes qui doivent être prises en compte pour moitié dans la limite d’un plafond de trois ans seront prises en compte pour moitié dans la limite d’un plafond de sept ans ;

5)

les périodes accomplies dans un contrat de formation comme apprenti dans une collectivité territoriale ne seront prises en compte par anticipation que si la fonctionnaire ou le fonctionnaire a entamé une relation de travail après le 31 mars 2000 ;

6)

les périodes d’une activité d’agent (en formation) scientifique (artistique) visé à l’article 6 du [Bundesgesetz über die Abgeltung von wissenschaftlichen und künstlerischen Tätigkeiten an Universitäten und Universitäten der Künste (loi fédérale relative au régime pécuniaire des activités scientifiques et artistiques dans les universités et universités d’art, BGBl. 463/1974)], ne seront prises en compte par anticipation que si la fonctionnaire ou le fonctionnaire a entamé une relation de travail après le 30 septembre 2001.

4.   Les autres périodes qui ne sont prises en compte que pour moitié ne seront prises en compte par anticipation dans le calcul de la date de référence de comparaison que dans la mesure où elles excèdent 4 années à considérer pour moitié.

5.   Lorsqu’un plafond ou une perte, comme en cas de transfert, a été légalement prévu pour la prise en compte par anticipation de périodes accomplies après 18 ans, ces dispositions seront appliquées à l’identique à toutes les périodes à prendre en compte.

6.   Dans la mesure où les paragraphes 3 à 5 ne prévoient pas de règles dérogatoires, dans la prise en compte par anticipation de périodes, il y a lieu de considérer la chose jugée en ce qui concerne les périodes accomplies après l’âge de 18 ans, lorsque celles-ci ont déjà été intégralement prises en compte par anticipation ou n’ont pas été ainsi prises en compte lors de la fixation de la date de référence de l’avancement (article 169f, paragraphe 4, dernière phrase) au titre des dispositions du paragraphe 2, points 1 à 5, ou de versions antérieures de ces dispositions. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

20

FW et CE sont des fonctionnaires de l’État fédéral autrichien.

21

FW, né en 1970, a été apprenti du 1er septembre 1985 au 1er août 1988 dans une entreprise publique. Le 1er juillet 1991, il a intégré la fonction publique fédérale autrichienne. La date du 17 septembre 1989 a été retenue comme date de référence de son avancement et de sa position dans le barème de rémunération.

22

CE, né en 1972, a été apprenti du 1er septembre 1987 au 31 août 1990 auprès d’une collectivité territoriale autrichienne. Il a intégré la fonction publique fédérale autrichienne le 1er novembre 1995. La date du 23 septembre 1990 a été retenue comme date de référence de son avancement et de sa position dans le barème de rémunération.

23

Au cours de l’année 2010, à la suite de la promulgation de la loi fédérale de réforme des salaires de 2010, FW et CE ont chacun introduit une demande visant à fixer une nouvelle date de référence de leur avancement afin que les périodes éligibles accomplies antérieurement à leur dix-huitième anniversaire soient également prises en compte et que leur position dans le barème de rémunération soit adaptée en conséquence.

24

Statuant sur ces demandes, l’administration fiscale a ensuite fixé de nouvelles dates de référence pour FW et CE, à savoir, respectivement, les 1er septembre 1986 et 1er juillet 1987. Toutefois, elle a refusé, sur le fondement du droit national en vigueur, toute modification de la position de ces derniers dans le barème de rémunération.

25

Au cours de l’année 2013, FW a de nouveau introduit une demande visant à obtenir la fixation de la date de référence pour son avancement d’échelon et de la position dans le barème de rémunération en résultant ainsi que le paiement d’arriérés de rémunération qui prennent en compte les périodes éligibles qu’il avait accomplies avant l’âge de 18 ans.

26

CE a, pour sa part, sollicité, au cours de l’année 2015, le paiement des arriérés de rémunération dus en raison de la nouvelle date de référence de son avancement, telle que fixée après sa demande effectuée en ce sens en 2010, ainsi que la rectification du montant de transfert, prévu par l’article 169c, paragraphe 2, du GehG de 2015.

27

L’administration fiscale ayant rejeté la demande de FW et ayant omis de prendre une décision en temps utile sur la demande de CE, ces derniers ont chacun saisi le Bundesverwaltungsgericht (tribunal administratif fédéral, Autriche) d’un recours. Cette juridiction a, par jugements du 28 septembre 2020, en ce qui concerne FW, et du 27 octobre 2020, en ce qui concerne CE, avancé la date de référence de l’avancement de FW d’un jour, à savoir au 16 septembre 1989, et celle de CE de quatre jours, à savoir au 19 septembre 1990, tout en rejetant la partie des recours visant le paiement d’arriérés de rémunération.

28

Par la suite, FW et CE ont introduit des recours en Revision contre ces jugements devant la juridiction de renvoi, à savoir le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche).

29

À titre liminaire, cette juridiction indique que le régime de rémunération autrichien de la fonction publique était initialement fondé sur le principe selon lequel les périodes d’activité d’un fonctionnaire accomplies avant l’âge de 18 ans ne devaient pas être prises en compte pour déterminer la date de référence de l’avancement.

30

À cet égard, la juridiction de renvoi rappelle que c’est seulement à la suite de l’arrêt du 18 juin 2009, Hütter (C‑88/08, EU:C:2009:381), dans lequel la Cour a constaté que les règles de détermination de la rémunération des fonctionnaires autrichiens étaient contraires au droit de l’Union dans la mesure où celles-ci ne prévoyaient pas la prise en compte des périodes de service accomplies avant l’âge de 18 ans, que le législateur national a adopté la loi fédérale de réforme des salaires de 2010.

31

À la suite de l’entrée en vigueur de cette loi, les périodes accomplies avant l’âge de 18 ans pouvaient, conformément aux dispositions du GehG de 2010, être prises en compte pour déterminer la date de référence de l’avancement, mais seulement à la demande du fonctionnaire intéressé et avec pour conséquence une prolongation de trois ans de la durée nécessaire pour l’avancement du premier au deuxième échelon. Or, dans son arrêt du 11 novembre 2014, Schmitzer (C‑530/13, EU:C:2014:2359), la Cour a jugé, en substance, que la directive 2000/78 s’oppose à une réglementation nationale qui, pour mettre fin à une discrimination fondée sur l’âge, prend ainsi en compte des périodes de formation et de service antérieures à l’âge de 18 ans, mais qui, simultanément, introduit à l’égard des seuls fonctionnaires victimes de cette discrimination un allongement de trois ans de la durée nécessaire pour pouvoir passer du premier au deuxième échelon de chaque catégorie d’emploi et de chaque catégorie salariale.

32

La juridiction de renvoi précise que le législateur national a ensuite adopté la loi fédérale de réforme des salaires de 2015 et la loi portant réforme des salaires de 2016, aux fins de remplacer, pour les fonctionnaires en service au 11 février 2015, le régime de rémunération, fondé sur la date de référence de l’avancement, par un nouveau régime, fondé sur l’ancienneté dans le barème de rémunération, en introduisant un mécanisme de reclassement effectué en fonction d’un « montant de transfert », calculé selon les règles du GehG de 2010 et donc, en définitive, fondé, pour les agents ayant été recrutés avant l’entrée en vigueur du GehG de 2010, à savoir avant le 31 août 2010, sur les dispositions de la version précédente de la loi sur les salaires qui, afin de prendre en compte l’expérience professionnelle antérieure au recrutement, opéraient une distinction selon que cette expérience avait eu lieu avant ou après le dix-huitième anniversaire des intéressés et dont le caractère discriminatoire avait été constaté dans l’arrêt du 18 juin 2009, Hütter (C‑88/08, EU:C:2009:381).

33

À cet égard, par son arrêt Leitner, la Cour a jugé que le droit de l’Union s’opposait également au régime de rémunération et d’avancement résultant du GehG de 2015, en estimant, en substance, que cette réglementation n’était pas en mesure d’établir un régime non discriminatoire pour les fonctionnaires défavorisés par le régime de rémunération et d’avancement résultant du GehG de 2010, dès lors qu’elle maintenait définitivement à leur égard la discrimination en fonction de l’âge instaurée par ce régime.

34

La juridiction de renvoi indique que le législateur autrichien a adopté la deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique afin de rendre conforme la législation nationale à la directive 2000/78 et à la jurisprudence susmentionnée de la Cour, notamment à l’arrêt Leitner. Cette loi concerne les fonctionnaires qui ont fait l’objet d’un transfert dans le nouveau régime de rémunération sur la base de leur ancienneté dans le barème de rémunération alors applicable sans prise en compte ultérieure des périodes les concernant accomplies avant l’âge de 18 ans. Le législateur autrichien a ainsi posé les bases d’un nouveau classement appliqué d’office, au moyen duquel est prévue, conformément aux articles 169f et 169g du GehG de 2020, une réévaluation, d’office, des périodes éligibles avant le dix-huitième anniversaire du fonctionnaire par la détermination d’une date de référence de comparaison.

35

Or, la juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si la deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique a désormais supprimé la discrimination constatée antérieurement par la Cour.

36

Premièrement, cette juridiction observe que le régime de rémunération prévu par le GehG de 2020 continue d’être fondé sur un mécanisme de transfert des fonctionnaires sur la base de l’ancienneté dans le barème de rémunération applicable au 28 février 2015, dont la détermination a été jugée discriminatoire par la Cour dans son arrêt Leitner. Le traitement du mois de février 2015, à savoir celui correspondant au mois du transfert, serait certes corrigé par la différence entre la date de référence de l’avancement et la date de référence de comparaison prévue à l’article 169g du GehG de 2020. Néanmoins, l’augmentation de trois ans à sept ans du plafond des « autres périodes » à prendre en compte pour moitié, prévue à cet article 169g, paragraphe 3, point 4, serait neutralisée par la déduction forfaitaire instaurée au paragraphe 4 dudit article, en vertu de laquelle ces périodes ne sont prises en compte dans le calcul de la date de référence de comparaison que dans la mesure où elles excèdent quatre années.

37

Deuxièmement, la juridiction de renvoi observe que, en vertu de l’article 169f, paragraphe 1, points 3 et 4, du GehG de 2020, les fonctionnaires dont, à la suite de l’introduction d’une demande en ce sens avant l’entrée en vigueur de la deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique, la date de référence a été recalculée compte tenu des périodes éligibles accomplies avant l’âge de 18 ans et dont la position dans le barème de rémunération a été révisée en conséquence ne bénéficient pas de la nouvelle fixation de cette position prévue à l’article 169g du GehG de 2020. En revanche, lorsque des fonctionnaires ont, comme en l’occurrence, déposé de telles demandes et ont également obtenu la fixation d’une nouvelle date de référence, mais sans que cela ait encore eu d’effet sur leur position dans le barème de rémunération, ils se verraient désormais appliquer l’article 169g du GehG de 2020 et courraient alors le risque de ne bénéficier, comme en l’occurrence, d’aucune amélioration réelle de la date de référence qui leur serait applicable ni donc de leur position dans le barème de rémunération. Or, il ressortirait de la jurisprudence de la Cour, notamment de l’arrêt du 16 juillet 2020, État belge (Regroupement familial – Enfant mineur) (C‑133/19, C‑136/19 et C‑137/19, EU:C:2020:577, point 42 ainsi que jurisprudence citée), qu’il n’est pas conforme aux principes d’égalité de traitement et de sécurité juridique que le succès d’une demande dépende de la célérité avec laquelle celle‑ci est traitée ou avec laquelle il est statué sur un recours, et donc de circonstances non imputables au demandeur.

38

Troisièmement, la juridiction de renvoi relève que, dans le cadre de la détermination de la date de référence de comparaison, l’article 169g, paragraphe 3, point 5, du GehG de 2020 prévoit la prise en compte intégrale des périodes d’apprentissage uniquement lorsque le fonctionnaire concerné a été recruté par une collectivité territoriale nationale après le 31 mars 2000. En revanche, les périodes d’apprentissage accomplies par les fonctionnaires recrutés avant cette date ne pourraient être prises en compte que pour moitié en tant qu’« autres périodes ». Il en résulterait que, en ce que ce régime défavorise les fonctionnaires recrutés avant ladite date, qui sont généralement plus âgés, il pourrait constituer une discrimination indirecte fondée sur l’âge.

39

Dans ces conditions, le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Le droit de l’Union, et en particulier les articles 1er, 2 et 6 de la directive [2000/78], lus conjointement avec l’article 21 de la [Charte], doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui remplace un régime de rémunération discriminatoire en raison de l’âge par un régime de rémunération dans lequel le classement d’un fonctionnaire est toujours déterminé selon l’ancienneté dans le barème de rémunération, calculée d’une manière non dépourvue de discrimination, conformément à l’ancien régime de rémunération à un mois de transfert déterminé (février 2015), en apportant certes une rectification aux périodes antérieures au recrutement initialement définies par la détermination d’une date de référence de comparaison mais dans lequel, à l’égard des périodes postérieures au dix-huitième anniversaire, seules les autres périodes à prendre en compte pour moitié sont soumises à un contrôle et dans lequel, face à l’allongement de quatre ans de la durée au titre de laquelle des périodes antérieures sont à considérer, les autres périodes à prendre en compte pour moitié ne seront prises en compte par anticipation aux fins de la détermination de la date de référence de comparaison que dans la mesure où elles excèdent quatre années à considérer pour moitié (déduction forfaitaire de quatre années à considérer pour moitié) ?

2)

La première question appelle-t-elle une réponse différente dans les procédures dans lesquelles une nouvelle date de référence de l’avancement a été définitivement fixée avant l’entrée en vigueur de la deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique, mais que cette date n’avait pas encore d’incidence sur la position du fonctionnaire dans le barème de rémunération, car une décision de l’autorité faisant directement application du droit de l’Union n’était pas encore intervenue, et dans lesquelles désormais la date de référence de comparaison doit être à nouveau déterminée sans considération de la date de référence de l’avancement fixée dans l’intervalle, toujours par rapport à la date de référence de l’avancement fixée de manière discriminatoire en raison de l’âge, et les autres périodes à considérer pour moitié sont soumises à la déduction forfaitaire ?

3)

Le droit de l’Union, et en particulier les articles 1er, 2 et 6 de la directive [2000/78], lus conjointement avec l’article 21 de la [Charte], doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale par laquelle, en dépit d’un nouveau calcul de l’ancienneté dans le barème de rémunération et de la position dans ce barème, les périodes accomplies dans une formation auprès d’une collectivité territoriale autrichienne ne doivent être prises en compte par anticipation dans la détermination de la date de référence de comparaison que lorsque le fonctionnaire a été engagé après le 31 mars 2000 et qu’autrement ces périodes ne doivent être prises en compte par anticipation qu’à concurrence de la moitié des périodes à considérer et sont dès lors soumises à la déduction forfaitaire, sachant que cette réglementation a ainsi tendance à désavantager les fonctionnaires qui ont une plus grande ancienneté ? »

La procédure devant la Cour

40

Par un courrier du 21 septembre 2022, le gouvernement autrichien a informé la Cour d’une modification législative intervenue depuis la décision de renvoi, à savoir l’abrogation, avec effet rétroactif, de l’article 169f, paragraphe 1, point 4, du GehG de 2020 par la Dienstrechts-Novelle 2022 (loi de 2022 modifiant le droit de la fonction publique, BGBl. I, 137/2022).

41

Par la suite, la Cour a adressé une demande d’éclaircissements à la juridiction de renvoi en invitant celle-ci à préciser, premièrement, si elle pouvait confirmer ladite modification législative, deuxièmement, si elle souhaitait maintenir son renvoi préjudiciel dans ces conditions et, troisièmement, dans l’affirmative, quelles conséquences devraient être tirées de cette modification législative sur le présent renvoi préjudiciel.

42

Par un courrier du 19 octobre 2022, la juridiction de renvoi a, tout d’abord, confirmé l’abrogation, avec effet rétroactif, de l’article 169f, paragraphe 1, point 4, du GehG de 2020. Elle a ensuite indiqué que les première et troisième questions ne seraient pas concernées par cette modification législative. Enfin, s’agissant de la deuxième question, la modification législative en cause n’aurait pas d’incidence sur la pertinence de celle-ci, dès lors que cette question se rapporte, avant tout, à l’interprétation de l’article 169f, paragraphe 3, du GehG de 2020. Conformément aux règles procédurales nationales, l’interprétation fournie par la juridiction de renvoi serait effectuée, en tout état de cause, au regard de la situation de fait et de droit existant à la date de la décision administrative attaquée dans le cadre du litige au principal, raison pour laquelle les modifications législatives adoptées ultérieurement ne seraient pas pertinentes, même si elles revêtent un effet rétroactif. Par conséquent, cette juridiction a décidé de maintenir la présente demande de décision préjudicielle dans son intégralité.

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

43

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 1er, 2 et 6 de la directive 2000/78, lus en combinaison avec l’article 21 de la Charte, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle le classement d’un fonctionnaire est fixé sur la base de son ancienneté dans le barème de rémunération d’un ancien régime de rémunération jugé discriminatoire en ce que ce régime permettait uniquement la prise en compte, aux fins de déterminer cette ancienneté, des périodes éligibles antérieures au recrutement du fonctionnaire accomplies à partir de l’âge de 18 ans à l’exclusion de celles accomplies avant cet âge, dès lors que cette réglementation prévoit qu’une correction des périodes éligibles du fonctionnaire accomplies antérieurement à son recrutement, telles qu’initialement calculées, est effectuée en déterminant une date de référence de comparaison, aux fins de laquelle sont désormais prises en compte, pour déterminer ladite ancienneté, les périodes éligibles antérieures au recrutement accomplies avant le dix-huitième anniversaire de ce fonctionnaire lorsque, d’une part, en ce qui concerne les périodes accomplies après le dix-huitième anniversaire, seules les « autres périodes » à considérer pour moitié sont prises en compte et, d’autre part, lesdites « autres périodes » sont augmentées de trois à sept années, mais seulement prises en considération dans la mesure où elles dépassent une durée de quatre années.

44

À titre liminaire, il importe de souligner que, en l’occurrence, se pose ainsi la question de savoir si une différence de traitement fondée sur l’âge constatée par la Cour peut être considérée comme étant supprimée dès lors que la réglementation nationale visant à éliminer définitivement cette différence de traitement prévoit que, dans le cadre du nouveau calcul de l’ancienneté d’un fonctionnaire dans le barème de rémunération, les périodes éligibles antérieures au recrutement doivent également être prises en compte lorsqu’elles sont accomplies avant l’âge de 18 ans, et ce notamment en tant qu’« autres périodes » à prendre en compte pour moitié au cours d’une période de sept années au lieu de celle de trois années prévue par la réglementation nationale antérieure, mais que lesdites périodes ne permettent de déterminer l’ancienneté dans le barème de rémunération que dans l’hypothèse où elles excèdent une durée de quatre années.

45

À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’interdiction de toute discrimination fondée, notamment, sur l’âge est consacrée à l’article 21 de la Charte et que cette interdiction a été concrétisée par la directive 2000/78 dans le domaine de l’emploi et du travail [arrêt du 17 novembre 2022, Ministero dell’Interno (Limite d’âge pour le recrutement des commissaires de police), C‑304/21, EU:C:2022:897, point 36 et jurisprudence citée].

46

Ainsi, il convient, dans un premier temps, d’examiner si la réglementation nationale en cause dans l’affaire au principal institue une différence de traitement, au sens de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2000/78.

47

À cet égard, il y a lieu de rappeler que, aux termes de cette disposition, le « principe de l’égalité de traitement » est entendu comme étant l’absence de toute discrimination directe ou indirecte, fondée sur l’un des motifs visés à l’article 1er de cette directive. L’article 2, paragraphe 2, sous a), de celle-ci précise que, aux fins de son paragraphe 1, une discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est dans une situation comparable, sur la base de l’un des motifs visés à l’article 1er de ladite directive.

48

Dans l’affaire au principal, les catégories de personnes pertinentes aux fins de cette comparaison sont, d’une part, les fonctionnaires qui ont accompli des périodes éligibles, ne serait-ce qu’en partie, avant d’avoir atteint l’âge de 18 ans et, d’autre part, ceux qui ont accompli de telles périodes de même nature et d’une durée comparable après avoir atteint cet âge.

49

Il ressort du dossier dont dispose la Cour que le législateur autrichien a, par l’adoption de la deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique, introduit un nouveau régime de fixation de l’ancienneté des fonctionnaires dans le barème de rémunération pour rendre conforme la législation nationale à la jurisprudence de la Cour découlant de l’arrêt Leitner.

50

Plus particulièrement, par l’adoption de l’article 169f, paragraphe 1, du GehG de 2020, ledit législateur visait à fixer, d’office, dans le barème de rémunération, la position des fonctionnaires en service ayant fait l’objet d’un mécanisme de reclassement effectué en fonction d’un « montant de transfert » conformément à l’article 169c, paragraphe 2, du GehG de 2015, alors que ce montant de transfert avait été déterminé sur la base de dispositions opérant une distinction, en ce qui concerne la prise en compte de périodes éligibles antérieures au recrutement, selon que les périodes en question se situaient avant ou après le dix-huitième anniversaire des intéressés.

51

Or, dans son arrêt Leitner, la Cour a jugé que le transfert des fonctionnaires en service vers un nouveau régime de rémunération et d’avancement, opéré conformément audit article 169c, paragraphe 2, du GehG de 2015, dans le cadre duquel le premier classement de ces fonctionnaires avait été déterminé en fonction de leur dernière rémunération perçue au titre du régime antérieur, maintenait la discrimination directe fondée sur l’âge, au sens de la directive 2000/78, instaurée par ce régime antérieur.

52

Dès lors, il convient d’apprécier si les modifications apportées par la deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique ont effectivement et définitivement éliminé ladite discrimination directe fondée sur l’âge, inhérente à l’ancien régime de rémunération.

53

S’agissant de la nouvelle détermination de l’ancienneté dans le barème de rémunération, telle qu’instaurée par cette loi, il importe de souligner que ladite loi procède en deux étapes. Premièrement, est reprise l’ancienneté dans le barème de rémunération applicable aux rémunérations du 28 février 2015, conformément à l’article 169f, paragraphe 4, du GehG de 2020. Cette ancienneté est calculée sur la base du montant de transfert au sens de l’article 169c, paragraphe 2, du GehG de 2015, c’est-à-dire de la rémunération brute qui a servi de base au calcul de la rémunération mensuelle d’un fonctionnaire pour le mois de février 2015 (mois de transfert).

54

Deuxièmement, l’ancienneté dans le barème de rémunération peut faire, en vertu de l’article 169f, paragraphe 4, deuxième phrase, du GehG de 2020, l’objet d’une correction par la prise en compte de la différence entre la date de référence de l’avancement et une date de référence de comparaison, calculée selon les modalités visées à l’article 169g du GehG de 2020, afin, le cas échéant, d’augmenter ladite ancienneté de la durée du désavantage subi précédemment dans la prise en compte des périodes d’activité professionnelles accomplies antérieurement au recrutement du fonctionnaire.

55

Or, d’une part, il découle de l’arrêt Leitner (point 37) que le barème de rémunération, tel qu’il résulte de la GehG de 2015, est susceptible de maintenir les effets produits par l’ancien régime de rémunération et d’avancement, en raison du lien que ce barème établit entre le dernier salaire perçu en application de ce régime et le classement dans le nouveau régime de rémunération et d’avancement.

56

Dans la mesure où le transfert s’effectue sans opérer une distinction entre les fonctionnaires qui ont été désavantagés par l’ancien régime de rémunération et d’avancement et ceux qui ne l’ont pas été, il y a lieu de relever que le régime autrichien de rémunération applicable au litige au principal semble continuer de se fonder, du moins dans un premier temps, sur la date de référence de l’avancement calculée, selon l’arrêt Leitner, de manière discriminatoire, ainsi que sur le montant de transfert qui en découle.

57

D’autre part, en vertu de l’article 169g, paragraphe 1, du GehG de 2020, la date de référence de comparaison est calculée en prenant en compte par anticipation au jour du recrutement les périodes éligibles antérieures accomplies après avoir atteint l’âge de 14 ans, cet âge étant l’âge minimal requis en droit de l’Union pour entamer une relation de travail, permettant ainsi notamment de prendre en compte, également lorsqu’elles sont accomplies avant le dix-huitième anniversaire du fonctionnaire, les périodes visées à l’article 169g, paragraphe 2, point 1, du GehG de 2020, à savoir, en substance, certaines périodes de travail et de formation à prendre en compte dans leur intégralité ainsi que les « autres périodes » mentionnées au point 44 du présent arrêt.

58

À cet égard, selon les explications du gouvernement autrichien, ce nouveau calcul a conduit, parmi les 48047 cas clôturés jusque-là, à une amélioration de l’ancienneté dans le barème de rémunération comprise entre un mois et un an dans 19463 cas, et à une amélioration de cette ancienneté de plus d’un an dans 2821 cas, ces derniers cas comprenant le plus souvent des agents ayant entamé une relation de travail ou, comme M. Hütter dans le litige au principal en cause dans l’affaire C‑88/08, une formation éligible avant leur dix-huitième anniversaire, pour lesquels ces périodes doivent à présent être comptabilisées en tant que périodes éligibles dans leur intégralité afin de fixer la position de ces agents dans le barème de rémunération.

59

Il apparaît ainsi, sous réserve des vérifications à opérer par la juridiction de renvoi, que la date de référence de comparaison a effectivement permis de prendre en compte des périodes éligibles accomplies avant le dix-huitième anniversaire du fonctionnaire afin de corriger l’ancienneté, précédemment fixée sur la base de l’article 169c du GehG de 2015 sans prise en compte desdites périodes.

60

La juridiction de renvoi fait toutefois observer que, conformément à l’article 169g, paragraphe 6, du GehG de 2020, toutes les périodes éligibles antérieures au recrutement du fonctionnaire concerné ne sont pas à prendre en compte, dans la mesure où les périodes accomplies après le dix-huitième anniversaire qui ont déjà fait l’objet d’une évaluation pour fixer la date de référence de l’avancement ne sauraient faire l’objet d’une nouvelle évaluation.

61

Cependant, en vertu de la « déduction forfaitaire » prévue à l’article 169g, paragraphe 4, du GehG de 2020, les « autres périodes », prises en compte pour moitié, ne seront prises en compte par anticipation dans le calcul de la date de référence de comparaison que si elles excèdent une durée de quatre années.

62

À cet égard, la juridiction de renvoi fait observer que, si le plafond des « autres périodes » à prendre en compte pour moitié au titre de l’article 12, paragraphe 1, point 2, sous b), de la loi sur les salaires de 1956, telle que modifiée par la deuxième loi de 2007 modifiant le droit de la fonction publique, a été élevé de trois à sept ans par l’article 169g, paragraphe 3, point 4, du GehG de 2020, le paragraphe 4 de cet article a pour effet que ce relèvement du plafond des « autres périodes » à sept années est compensé par la déduction forfaitaire de quatre années prévue par cette dernière disposition.

63

Pourtant, il y a lieu de relever, d’une part, que l’article 169g, paragraphe 4, du GehG de 2020 semble s’appliquer à tous les fonctionnaires en service, sans opérer de distinction selon que lesdits fonctionnaires aient été désavantagés ou non par le régime de rémunération et d’avancement résultant du GehG de 2015 en fonction de leur âge respectif, ce qu’il incombe également à la juridiction de renvoi de vérifier. D’autre part, la déduction forfaitaire de quatre années prévue par cette disposition semble s’appliquer quel que soit l’âge du fonctionnaire auquel les « autres périodes » d’activité professionnelle visées ont été accomplies, à savoir avant ou après le dix-huitième anniversaire de l’intéressé.

64

Toutefois, il y a lieu de souligner que, dans la mesure où la prise en compte pour moitié des périodes éligibles accomplies entre l’âge de 14 ans et l’âge de 18 ans est neutralisée par l’application de la déduction forfaitaire de quatre années, prévue à l’article 169g, paragraphe 4, du GehG de 2020, les fonctionnaires disposant seulement de telles périodes accomplies antérieurement à l’âge de 18 ans apparaissent comme étant privés du droit d’obtenir une amélioration de leur position dans le barème de rémunération.

65

Il s’ensuit que, en l’occurrence, en raison de la déduction forfaitaire de quatre années prévue à l’article 169g, paragraphe 4, du GehG de 2020, les périodes d’apprentissage des requérants en cause au principal n’ont pas eu d’incidence significative sur le calcul de la date de référence de comparaison, et ce malgré le relèvement de quatre années du plafond des « autres périodes » au titre de la période à considérer et, dès lors, également, sur la détermination de leur position dans le barème de rémunération.

66

Partant, sous réserve d’une appréciation à opérer par la juridiction de renvoi, la deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique ne paraît pas avoir éliminé la discrimination fondée sur l’âge, constatée par l’arrêt Leitner, dans la mesure où, notamment, la détermination de l’ancienneté dans le barème de rémunération continue d’être opérée au regard d’une différence de traitement entre les fonctionnaires dont l’expérience professionnelle a été, ne serait-ce qu’en partie, acquise avant l’âge de 18 ans et ceux qui ont obtenu, après avoir atteint cet âge, une expérience de même nature et de durée comparable.

67

Il convient, dans un second temps, d’examiner si cette différence de traitement pourrait être justifiée en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78.

68

Aux termes de cette disposition, nonobstant l’article 2, paragraphe 2, de cette directive, les États membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires.

69

En l’occurrence, il ressort du dossier dont dispose la Cour que les modifications législatives du régime de rémunération et d’avancement en cause au principal semblent être guidées par des considérations d’ordre tant budgétaire qu’administratif, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

70

S’il ressort, certes, de la jurisprudence de la Cour que des considérations d’ordre budgétaire peuvent être à la base des choix de politique sociale d’un État membre et influencer la nature ou l’étendue des mesures qu’il souhaite adopter, de telles considérations ne peuvent constituer à elles seules un objectif légitime, au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78 (arrêt du 21 juillet 2011, Fuchs et Köhler, C‑159/10 et C‑160/10, EU:C:2011:508, point 74). Il en va de même en ce qui concerne les considérations d’ordre administratif mentionnées par le gouvernement autrichien (arrêt Leitner, point 43 et jurisprudence citée).

71

Ainsi, même si la réglementation en cause au principal est susceptible d’assurer la protection des droits acquis et de la confiance légitime à l’égard des fonctionnaires favorisés par le régime de rémunération prévu par le GehG de 2015, elle ne paraît pas apte à établir un régime non discriminatoire pour les fonctionnaires défavorisés par ce régime de rémunération et d’avancement, dès lors qu’elle semble maintenir à leur égard la discrimination en fonction de l’âge instaurée par le régime antérieur (voir, par analogie, arrêt Leitner, point 49).

72

Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il convient de répondre à la première question que les articles 1er, 2 et 6 de la directive 2000/78, lus en combinaison avec l’article 21 de la Charte, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle le classement d’un fonctionnaire est fixé sur la base de son ancienneté dans le barème de rémunération d’un ancien régime de rémunération jugé discriminatoire en ce que ce régime permettait uniquement la prise en compte, aux fins de déterminer cette ancienneté, des périodes éligibles antérieures au recrutement du fonctionnaire accomplies à partir de l’âge de 18 ans à l’exclusion de celles accomplies avant cet âge, dès lors que cette réglementation prévoit qu’une correction des périodes éligibles du fonctionnaire accomplies antérieurement à son recrutement, telles qu’initialement calculées, est effectuée en déterminant une date de référence de comparaison, aux fins de laquelle sont désormais prises en compte, pour déterminer ladite ancienneté, les périodes éligibles antérieures au recrutement accomplies avant le dix-huitième anniversaire de ce fonctionnaire lorsque, d’une part, en ce qui concerne les périodes accomplies après le dix-huitième anniversaire, seules les « autres périodes » à considérer pour moitié sont prises en compte et, d’autre part, lesdites « autres périodes » sont augmentées de trois à sept années, mais seulement prises en considération dans la mesure où elles dépassent une durée de quatre années.

Sur la deuxième question

73

Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si le droit de l’Union doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale prévoyant, s’agissant des fonctionnaires pour lesquels une procédure destinée à redéfinir leur position dans le barème de rémunération était pendante à la date de la publication d’une modification législative du régime de rémunération comprenant ce barème, que les rémunérations sont recalculées conformément aux nouvelles dispositions relatives à la date de référence de comparaison, dispositions comportant de nouvelles limitations en ce qui concerne l’étendue maximale des périodes éligibles, alors qu’un tel calcul n’est pas effectué pour les fonctionnaires pour lesquels une procédure ayant un objet identique, engagée antérieurement, a déjà été clôturée par une décision définitive, fondée sur une date de référence fixée de manière plus favorable en vertu de l’ancien régime de rémunération dont les dispositions considérées comme étant discriminatoires par le juge national ont été laissées inappliquées en application directe du principe de l’égalité de traitement prévu par le droit de l’Union.

74

Afin de répondre à cette question, il convient d’examiner si la réglementation nationale en cause au principal, en ce qu’elle fait dépendre le nouveau calcul des rémunérations, effectué sur le fondement des dispositions relatives à la date de référence de comparaison, du fait qu’une procédure destinée à redéfinir la position du fonctionnaire dans le barème de rémunération était pendante ou clôturée au moment de la publication de cette réglementation, institue une différence de traitement contraire au droit de l’Union.

75

À cet égard, d’une part, il ressort de l’article 169f, paragraphe 3, du GehG de 2020 que, lorsque des procédures ayant pour objet la prise en compte de périodes d’activité antérieures au recrutement de fonctionnaires étaient pendantes au jour de la publication de la deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique, la nouvelle fixation de la date de référence de l’avancement, la nouvelle fixation de l’ancienneté dans le barème de rémunération ou la fixation de la position de ces fonctionnaires dans ce barème se fait dans le cadre de ces procédures.

76

D’autre part, il découle d’une lecture a contrario de l’article 169f, paragraphe 1, point 4, du GehG de 2020 que sont exclus d’un tel reclassement les fonctionnaires pour lesquels une nouvelle date de référence de l’avancement avait, à la date de la publication de la deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique, déjà été fixée de manière définitive, en prenant en compte les périodes d’activité antérieures au recrutement de ces fonctionnaires accomplies avant l’âge de 18 ans, à la suite d’une demande en ce sens, de sorte que l’application de cette nouvelle date a entraîné une amélioration de la position des fonctionnaires concernés dans le barème de rémunération.

77

Dès lors, s’agissant des catégories de personnes comparables, l’article 169f, paragraphe 3, du GehG de 2020 semble avoir pour effet, sous réserve d’une appréciation à opérer par la juridiction de renvoi, que les fonctionnaires qui ont pu conduire à leur terme des procédures dans lesquelles ils ont invoqué l’existence d’une discrimination fondée sur l’âge bénéficient d’une prise en compte intégrale des périodes d’activité antérieures à leur recrutement accomplies avant l’âge de 18 ans. En revanche, dans l’hypothèse où de telles procédures n’étaient pas encore clôturées à la date de la publication de la deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique, à savoir le 8 juillet 2019, les fonctionnaires concernés sont traités de la même manière que tous les autres fonctionnaires, pour lesquels la correction de la date de référence de comparaison doit être effectuée d’office.

78

Ainsi, il apparaît que, sous réserve d’une vérification à opérer par la juridiction de renvoi, pour la première catégorie de fonctionnaires, il a été mis fin au traitement que la Cour a jugé comme étant discriminatoire dans l’arrêt Leitner, en ce que ces fonctionnaires ont pu bénéficier de la solution exposée au point 75 de cet arrêt, consistant notamment à ce que, aussi longtemps que des mesures rétablissant l’égalité de traitement n’ont pas été adoptées, soient octroyés aux fonctionnaires défavorisés par l’ancien régime de rémunération et d’avancement les mêmes avantages que ceux dont ont pu bénéficier les fonctionnaires favorisés par ce régime, en ce qui concerne tant la prise en compte de périodes de service accomplies avant l’âge de 18 ans que l’avancement dans le barème de rémunération. En revanche, ainsi qu’il découle de la réponse de la Cour à la première question, tel n’est pas le cas quant à la seconde catégorie de fonctionnaires.

79

La juridiction de renvoi fait observer que, en ce qui concerne les requérants au principal, qui relèvent de cette seconde catégorie, l’administration fiscale a calculé à nouveau pour chacun d’eux une date de référence de l’avancement prenant en compte trois années supplémentaires par rapport à la date de référence de l’avancement qui leur avait été appliquée à la suite de leur recrutement. Toutefois, ces nouveaux calculs n’auraient pas entraîné une amélioration de la position de ces requérants dans le barème de rémunération, dès lors que les procédures les concernant étaient toujours pendantes à la date de la publication de la deuxième loi de 2019 modifiant le droit de la fonction publique. Ainsi, la date de référence de comparaison devrait, à nouveau, découler de la date de référence de l’avancement qui leur a été appliquée à la suite de leur recrutement, c’est-à-dire d’une date qui aurait été calculée de manière discriminatoire. Il s’ensuivrait que la date de référence de l’avancement applicable auxdits requérants serait améliorée non pas de trois années supplémentaires, mais seulement de quelques jours.

80

À cet égard, il convient de souligner que toute mesure qui vise à éliminer une discrimination contraire au droit de l’Union, y compris les mesures individuelles relatives à l’octroi aux personnes de la catégorie défavorisée des mêmes avantages que ceux dont bénéficient les personnes de la catégorie privilégiée, constitue une mise en œuvre de ce droit, qui doit respecter les exigences de celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 7 octobre 2019, Safeway, C‑171/18, EU:C:2019:839, point 37).

81

Parmi ces exigences, figurent celles découlant du principe général d’égalité de traitement consacré à l’article 20 de la Charte et du principe de sécurité juridique.

82

Or, il découle de la jurisprudence de la Cour qu’une réglementation nationale, telle que l’article 169f, paragraphe 3, du GehG de 2020, qui a pour effet, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, de traiter différemment les fonctionnaires qui ont engagé une procédure afin d’obtenir une nouvelle fixation de la date de référence de l’avancement les concernant sur la base des périodes d’activité antérieures à leur recrutement accomplies avant l’âge de 18 ans, selon que les autorités ou les juridictions compétentes pour le réexamen de ces périodes ont ou non déjà statué de manière définitive, est contraire au principe d’égalité de traitement, tel que consacré à l’article 20 de la Charte, et à celui de sécurité juridique, qui exigent un traitement identique et prévisible de tous les fonctionnaires se trouvant chronologiquement dans la même situation, dans la mesure où la prise en compte desdites périodes dépend de circonstances non imputables aux fonctionnaires concernés, telles que la durée de traitement de leurs demandes [voir, par analogie, arrêt du 9 septembre 2021, Bundesrepublik Deutschland (Membre de la famille), C‑768/19, EU:C:2021:709, point 41 et jurisprudence citée].

83

Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la deuxième question que le principe d’égalité de traitement, tel que consacré à l’article 20 de la Charte, ainsi que le principe de sécurité juridique doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale prévoyant, s’agissant des fonctionnaires pour lesquels une procédure destinée à redéfinir leur position dans le barème de rémunération était pendante à la date de la publication d’une modification législative du régime de rémunération comprenant ce barème, que les rémunérations sont recalculées conformément aux nouvelles dispositions relatives à la date de référence de comparaison, dispositions comportant de nouvelles limitations en ce qui concerne l’étendue maximale des périodes éligibles, de sorte qu’une discrimination fondée sur l’âge contraire aux articles 1er, 2 et 6 de la directive 2000/78, lus en combinaison avec l’article 21 de la Charte, n’est pas éliminée, alors qu’un tel calcul n’est pas effectué pour les fonctionnaires pour lesquels une procédure ayant un objet identique, engagée antérieurement, a déjà été clôturée par une décision définitive, fondée sur une date de référence fixée de manière plus favorable en vertu de l’ancien régime de rémunération dont les dispositions considérées comme étant discriminatoires par le juge national ont été laissées inappliquées en application directe du principe de l’égalité de traitement prévu par le droit de l’Union.

Sur la troisième question

84

Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 1er, 2 et 6 de la directive 2000/78, lus en combinaison avec l’article 21 de la Charte, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale prévoyant que les périodes d’apprentissage effectuées auprès d’une collectivité territoriale nationale sont prises en compte dans leur totalité, dans le cadre de la détermination de la date de référence de comparaison, uniquement lorsque le fonctionnaire concerné a été recruté par l’État après une certaine date, alors que les périodes d’apprentissage sont prises en compte pour moitié, en étant soumises à une déduction forfaitaire, lorsque le fonctionnaire concerné a été recruté par l’État avant cette date.

85

D’emblée, il y a lieu de rappeler, ainsi qu’il découle du point 47 du présent arrêt, qu’il ressort de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2000/78, lu en combinaison avec l’article 1er de celle-ci, que, aux fins de cette directive, le principe de l’égalité de traitement impose l’absence de toute discrimination directe ou indirecte fondée, notamment, sur l’âge. Il ressort en outre de l’article 2, paragraphe 2, sous b), de ladite directive que, aux fins de celle-ci, une discrimination indirecte fondée sur l’âge se produit lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’un âge donné, par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires.

86

Dès lors, pour déterminer si les requérants au principal peuvent se prévaloir du principe rappelé au point précédent, il convient de vérifier si, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, les fonctionnaires recrutés par l’État fédéral autrichien jusqu’au 31 mars 2000 inclus et ceux recrutés à compter de cette date se voient appliquer, directement ou indirectement, un traitement différent en raison de l’âge qu’ils avaient à la date de leur recrutement.

87

À cet égard, il convient de constater que, conformément à l’article 169g, paragraphe 3, point 5, du GehG de 2020, les périodes d’apprentissage auprès d’une collectivité territoriale nationale ne sont prises en compte, dans le cadre de la détermination de la date de référence de comparaison, que si le fonctionnaire concerné a entamé une relation de travail auprès de l’État fédéral autrichien après le 31 mars 2000.

88

En l’occurrence, les périodes d’apprentissage des requérants au principal, accomplies auprès d’une collectivité territoriale nationale, ne peuvent être prises en compte dans leur totalité dans le cadre de la détermination de la date de comparaison, étant donné qu’ils ont chacun été recrutés par l’État fédéral autrichien avant le 31 mars 2000.

89

Il s’ensuit que cette différence de traitement résulte de la date de recrutement des fonctionnaires par cet État, puisque c’est en fonction de cette date que les règles relatives à la prise en compte des périodes d’apprentissage ont vocation à s’appliquer.

90

Or, en tant que seul critère pertinent aux fins de l’application des règles relatives à la prise en compte des périodes d’apprentissage résultant du GehG de 2020, la date de recrutement du fonctionnaire par l’État fédéral autrichien, visée à l’article 169g, paragraphe 3, point 5, du GehG de 2020, constitue un critère indépendant de l’âge du fonctionnaire à la date de son recrutement. Partant, ce critère, qui fait dépendre l’application de règles nouvelles de la seule date de recrutement du fonctionnaire est, en tant qu’élément objectif et neutre, manifestement étranger à toute prise en considération de l’âge des personnes recrutées (arrêt du 14 février 2019, Horgan et Keegan, C‑154/18, EU:C:2019:113, point 25 ainsi que jurisprudence citée).

91

Par conséquent, les nouvelles conditions de prise en compte des périodes d’apprentissage effectuées auprès d’une collectivité territoriale nationale, en fonction de la date d’entrée en service auprès de l’État fédéral autrichien, reposent sur un critère qui n’est aucunement lié à l’âge des fonctionnaires concernés, rien n’indiquant par ailleurs que lesdites conditions comporteraient une quelconque discrimination indirecte fondée sur l’âge (voir, en ce sens, arrêt du 20 octobre 2022, Curtea de Apel Alba Iulia e.a., C‑301/21, EU:C:2022:811, points 58 et 59 ainsi que jurisprudence citée).

92

Au regard des observations qui précèdent, il convient de répondre à la troisième question que les articles 1er, 2 et 6 de la directive 2000/78, lus en combinaison avec l’article 21 de la Charte, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale prévoyant que les périodes d’apprentissage effectuées auprès d’une collectivité territoriale nationale sont prises en compte dans leur totalité, dans le cadre de la détermination de la date de référence de comparaison, uniquement lorsque le fonctionnaire concerné a été recruté par l’État après une certaine date, alors que les périodes d’apprentissage sont prises en compte pour moitié, en étant soumises à une déduction forfaitaire, lorsque le fonctionnaire concerné a été recruté par l’État avant cette date.

Sur les dépens

93

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit :

 

1)

Les articles 1er, 2 et 6 de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, lus en combinaison avec l’article 21 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne,

doivent être interprétés en ce sens que :

ils s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle le classement d’un fonctionnaire est fixé sur la base de son ancienneté dans le barème de rémunération d’un ancien régime de rémunération jugé discriminatoire en ce que ce régime permettait uniquement la prise en compte, aux fins de déterminer cette ancienneté, des périodes éligibles antérieures au recrutement du fonctionnaire accomplies à partir de l’âge de 18 ans à l’exclusion de celles accomplies avant cet âge, dès lors que cette réglementation prévoit qu’une correction des périodes éligibles du fonctionnaire accomplies antérieurement à son recrutement, telles qu’initialement calculées, est effectuée en déterminant une date de référence de comparaison, aux fins de laquelle sont désormais prises en compte, pour déterminer ladite ancienneté, les périodes éligibles antérieures au recrutement accomplies avant le dix-huitième anniversaire de ce fonctionnaire lorsque, d’une part, en ce qui concerne les périodes accomplies après le dix-huitième anniversaire, seules les « autres périodes » à considérer pour moitié sont prises en compte et, d’autre part, lesdites « autres périodes » sont augmentées de trois à sept années, mais seulement prises en considération dans la mesure où elles dépassent une durée de quatre années.

 

2)

Le principe d’égalité de traitement, tel que consacré à l’article 20 de la charte des droits fondamentaux, ainsi que le principe de sécurité juridique

doivent être interprétés en ce sens que :

ils s’opposent à une réglementation nationale prévoyant, s’agissant des fonctionnaires pour lesquels une procédure destinée à redéfinir leur position dans le barème de rémunération était pendante à la date de la publication d’une modification législative du régime de rémunération comprenant ce barème, que les rémunérations sont recalculées conformément aux nouvelles dispositions relatives à la date de référence de comparaison, dispositions comportant de nouvelles limitations en ce qui concerne l’étendue maximale des périodes éligibles, de sorte qu’une discrimination fondée sur l’âge contraire aux articles 1er, 2 et 6 de la directive 2000/78, lus en combinaison avec l’article 21 de la charte des droits fondamentaux, n’est pas éliminée, alors qu’un tel calcul n’est pas effectué pour les fonctionnaires pour lesquels une procédure ayant un objet identique, engagée antérieurement, a déjà été clôturée par une décision définitive, fondée sur une date de référence fixée de manière plus favorable en vertu de l’ancien régime de rémunération dont les dispositions considérées comme étant discriminatoires par le juge national ont été laissées inappliquées en application directe du principe de l’égalité de traitement prévu par le droit de l’Union.

 

3)

Les articles 1er, 2 et 6 de la directive 2000/78, lus en combinaison avec l’article 21 de la charte des droits fondamentaux,

doivent être interprétés en ce sens que :

ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale prévoyant que les périodes d’apprentissage effectuées auprès d’une collectivité territoriale nationale sont prises en compte dans leur totalité, dans le cadre de la détermination de la date de référence de comparaison, uniquement lorsque le fonctionnaire concerné a été recruté par l’État après une certaine date, alors que les périodes d’apprentissage sont prises en compte pour moitié, en étant soumises à une déduction forfaitaire, lorsque le fonctionnaire concerné a été recruté par l’État avant cette date.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.

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