Une structure indépendante sur les abus sexuels, l’écoute des victimes, leur indemnisation, une étude historique et sociologique : autant de demandes formulées par des associations de victimes de prêtres italiens à l’Église de leur pays, et appuyées par un livre-choc signé notamment par l’historienne Lucetta Scaraffia (Agnus Dei. Gli abusi sessuali del clero in Italia, non traduit en français). Des demandes qui rappellent furieusement la méthode courageuse choisie par l’épiscopat français, avec la mise en place de la Ciase de Jean-Marc Sauvé. Sauf que jusqu’ici, sur le traitement des abus sexuels, l’Église italienne fait de la résistance. Après avoir prétendu qu’elle n’était pas concernée par le phénomène, elle explique aujourd’hui pouvoir le traiter seule, sans intervention extérieure, notamment de la justice. Elle a encore les moyens de s’opposer aux pressions qui vont croissant pour mettre fin à cette culture de l’abus en son sein.

→ ANALYSE. Abus sexuels en Italie, les évêques sous pression

L’influence de la religion reste importante – malgré une pratique dominicale en chute libre. Surtout, l’Église italienne est l’une des plus riches du monde, grâce à un système de financement par l’impôt particulièrement avantageux, qui lui permet de se défendre et d’acheter le silence des victimes, dans un pays où la pédocriminalité reste taboue. Pour les prélats italiens, la méthode Sauvé fait donc office de chiffon rouge. Influents encore à la Curie, ils ont tout fait pour que les membres de la commission française ne soient pas reçus par le pape. Pourtant, l’opinion publique italienne évolue. Et l’Église ne pourra longtemps refuser de l’entendre, sauf à perdre toute sa crédibilité. Le pape peut y contribuer : évêque de Rome, c’est lui qui nomme le président des évêques transalpins. Sa volonté de traiter vraiment les abus sera aussi jugée sur sa gestion du cas italien.