“Nous ferons barrage au colonialisme brutal, ou à ce qu’il en reste. Malheureusement, Cette pensée [colonialiste] est utilisée par des Algériens, ou des pseudo-Algériens, des traîtres, homosexuels et mercenaires. Ils sont restés aux côtés de ces gens. Ils ne font pas partie de nous, ni nous d’eux”
Salah Eddine Dahmoune
Ministre algérien de l’Intérieur

Ce sont quelques mots qui risquent de tendre encore plus le climat politique en Algérie. À huit jours de la première élection présidentielle de l’ère post-Bouteflika, ces propos “gravissimes”, comme l’écrit Liberté en Une, ont été prononcés mardi 3 décembre par Salah Eddine Dahmoune, le ministre algérien de l’Intérieur, devant le Sénat, alors qu’il défendait un projet de loi.

L’homme évoque alors les manifestants, qui depuis neuf mois, mènent un mouvement sans précédent de contestation du système en place, et les accuse d’être manipulés par des puissances extérieures, rapporte le quotidien El Watan.

Traîtres”, “pervers” ou “homosexuels”, ces termes ont immédiatement fait polémique et agité les réseaux sociaux. “Le vocabulaire du personnel politique s’enrichit à l’occasion de nouveaux qualificatifs après ceux prononcés par le chef d’état-major et le chef de l’État (‘chirdhima [groupuscules]’, ‘quelques éléments’, etc..), poursuit El Watan. Les propos indécents du ministre devant les sénateurs s’ajoutent aux nombreuses attaques prononcées à l’encontre du mouvement populaire et de ses partisans.

Ce n’est pas la première fois que le pouvoir en place cherche à discréditer le Hirak, mais jamais de tels termes n’ont été employés par un personnage politique de premier plan. Cette déclaration intervient alors que la présidentielle, prévue pour le 12 décembre, devrait se tenir dans des conditions extrêmement compliquées.

Le mouvement de protestation appelle au boycott des élections, qu’il ne reconnaît pas. Les protestataires estiment en effet que c’est toujours le même système, que celui en place sous les 20 années de présidence d’Abdelaziz Bouteflika, qui resterait au pouvoir. Les cinq candidats, dont deux anciens Premier ministres et deux anciens ministres, ont du mal à mener campagne. Rien n’assure donc que le vote pourra se dérouler sur l’ensemble du territoire.

Après plusieurs reports, le premier procès d’ex-dirigeants algériens incarcérés pour corruption, s’est ouvert mercredi.