"Antiquités du sang", quand pillage et pandémie font bon ménage !

Bustes de divinité funéraire, retrouvées dans la nécropole de Cyrène (Cyrénaïque, Libye) - Musée de Cyrène - © MAFL
Bustes de divinité funéraire, retrouvées dans la nécropole de Cyrène (Cyrénaïque, Libye) - Musée de Cyrène - © MAFL
Bustes de divinité funéraire, retrouvées dans la nécropole de Cyrène (Cyrénaïque, Libye) - Musée de Cyrène - © MAFL
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Le magazine d’archéologie de France Culture évoque dans cette émission ce que l’on appelle « les antiquités du sang » et tente de décrypter les mécanismes et les enjeux de ce trafic à travers le monde.

Avec
  • Lazare Eloundou Assomo Directeur du Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO
  • Vincent Michel Archéologue, professeur des universités en Archéologie de l'Antiquité classique d'Orient à l'Université de Poitiers

Le sujet était une « urgence » puisque le trafic d’antiquités et le pillage des sites archéologiques semble profiter de la pandémie mondiale du Covid-19 et prend, actuellement, une ampleur insoupçonnée. Cinquante ans après la convention interdisant l’importation et l’exportation illicites des biens culturels, que se passe-t-il aujourd’hui ?

Deux plaques sculptées saisies par les douanes à l'aéroport de Roissy, provenant du Liban et à destination de la Thaïlande (mars 2016).
Deux plaques sculptées saisies par les douanes à l'aéroport de Roissy, provenant du Liban et à destination de la Thaïlande (mars 2016).
- © Douanes françaises

La pandémie a en effet affecté la surveillance des sites culturels et des musées, entrainant notamment une augmentation des fouilles illégales de sites archéologiques. Parallèlement, des chercheurs (dont ceux du projet Athar) signalaient l’accroissement des ventes illicites en ligne de biens culturels issus de fouilles clandestines.

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Buste de divinité funéraire voilée, retrouvée dans la nécropole de Cyrène (Cyrénaïque, Libye) - Musée de Cyrène
Buste de divinité funéraire voilée, retrouvée dans la nécropole de Cyrène (Cyrénaïque, Libye) - Musée de Cyrène
- © MAFL

Syrie et Irak, mais aussi Yémen, dont on parle si peu, Sahel et Libye sont à l’origine de ses antiquités de sang. Rappelons que l’archéologie aurait constitué le deuxième poste des recettes du groupe terroriste Daesh et qu’aujourd’hui nombre de ses vestiges archéologiques sont conservés dans des ports-francs comme Genève, Bangkok ou les Emirats. Après la drogue et les armes, biens culturels et antiquités sont au troisième rang des commerces illicites mondiaux. 

La basilique occidentale d'Erythron-Latrun (Cyrénaïque, Libye)restaurée entre 2001 et 2004 - (photo 1) et la basilique détruite par Daesch entre 2013 et 2019 - (photo 2).

La basilique occidentale d'Erythron-Latrun (Cyrénaïque, Libye) après sa restauration entre 2001 et 2004.
La basilique occidentale d'Erythron-Latrun (Cyrénaïque, Libye) après sa restauration entre 2001 et 2004.
- © MAFL
La basilique occidentale d'Erythron-Latrun (Cyrénaïque, Libye) après ses destructions par Daech entre 2013 et 2019
La basilique occidentale d'Erythron-Latrun (Cyrénaïque, Libye) après ses destructions par Daech entre 2013 et 2019
- © MAFL

L’exemple de la Libye, actuellement pays martyr, est aujourd’hui éloquent. Durant la guerre de février à octobre 2011, l’archéologie n’est en rien un réel enjeu, mais depuis cette date, les sites, notamment antiques, sont désormais pillés et les vestiges volés atteignent leur destination finale selon des cheminements complexes. Ainsi, une série de statues antiques, provenant de Cyrénaïque, a transité par l’Égypte jusqu’aux Émirats arabes unis avant de parvenir en Allemagne puis en Espagne… tandis que d’autres atteignent Israël plus aisément. Interpol, Unesco, Organisation mondiale des douanes, Unidroit, archéologues et conservateurs de musées s’unissent dans cette lutte, 50 ans après la Convention interdisant l'importation, l'exportation et le transport illicites de la propriété de biens culturels. 

Nous en parlons avec Lazare Eloundou Assomo, directeur adjoint de la division du patrimoine de l’UNESCO et Vincent Michel, professeur d’archéologie de l’Orient classique à l'université de Poitiers, HeRMA, directeur de la mission archéologique française de Libye.

Statue saisie : buste de divinité funéraire de Cyrène (objet saisi, en cours d'instruction).
Statue saisie : buste de divinité funéraire de Cyrène (objet saisi, en cours d'instruction).
- © MAFL

Pour aller plus loin

Page de Vincent Michel sur le site de l'université de Poitiers ( Laboratoire HeRMA - Hellénisation et Romanisation dans le Monde Antique).

A feuilleter, le dernier numéro du Courrier de l'Unesco, intitulé Trafic illicite des biens culturels, 50 ans de lutte.

Interview de Lazare Eloundou Assomo : « Trafic d'antiquités : il faut continuer de mettre en place la transparence » (Libération, 25 juin 2020).

A visionner, un numéro de complément d'enquête (France 2) " Trafiquants d'art : la guerre est déclarée" (diffusion le 20 février 2020).

Interviewes de Vincent Michel

« À Poitiers, un archéologue lutte contre le trafic illicite des biens culturels »  (La Nouvelle République, publié le 5 mars 2020).

« Lutte contre le trafic de biens culturels : le combat d’un professeur de l’université de Poitiers » (Université de Poitiers, Juin 2020).

« Antiquités : un réseau de pillage d’antiquités du Moyen-Orient démantelé » (France 3, 24 juin 2020).

« Le marché de l’art de nouveau dans la tourmente » (Le Figaro, 24 juin 2020).

« Coup de filet dans le trafic d’antiquités » (Ouest-France, 26 juin 2020).

« Una investigación destapa el turbio negocio de las antigüedades en Francia » (El Pais, 28 juin 2020) -  en espagnol.

« Illegal trafficking of cultural goods in countries in conflict » (Netcher, 7 octobre 2020) - en anglais.

« Terrorisme, la difficile lutte contre le trafic d'antiquités du sang » (Le Figaro, 3 octobre 2019).

Derniers textes parus sur ce thème

« Le trafic illicite des biens culturels dans les pays en conflit. De l’identification des objets à la judiciarisation des affaires », Patrimoines, revue de l’INP-Paris, 18, 2020, p. 58-65.  

« Agir pour la sauvegarde du patrimoine libyen », Cités millénaires – Voyage virtuel de Palmyre à Mossoul, Catalogue de l’exposition, IMA/Hazan, 2018, p. 106-108.

« Leptis Magna, une cité qui se voulait l’égale de Rome », Cités millénaires – Voyage virtuel de Palmyre à Mossoul, Catalogue de l’exposition, IMA/Hazan, 2018, p. 90-97. 

« De Leptis Magna à Derna, de la Tripolitaine à la Cyrénaïque : travaux récents sur la Libye antique »(Actes de la 2ème journée d’études sur la Libye antique et médiévale, Université de Poitiers & Institut du Monde Arabe, 2011), Collection Etudes Libyennes n°3,  Paris, juin 2016.

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