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Accord avec le FMI: une bouée de sauvetage pour l’économie argentine

Le pays a conclu un accord avec le FMI pour rééchelonner une dette de 44 milliards de dollars contractée en 2018, que le président Alberto Fernández jugeait «impayable». La contrepartie : moins de dépenses de l’Etat.
par François-Xavier Gomez
publié le 30 janvier 2022 à 17h36

«Nous avions la corde au cou», affirmait vendredi le président argentin en informant ses compatriotes de l’accord trouvé avec le Fonds monétaire international (FMI) au sujet de la dette du pays. Alberto Fernández n’exagérait pas : faute d’une renégociation, la troisième économie d’Amérique latine se serait retrouvée mardi en cessation de paiements.

Le ministre de l’Economie, Martín Guzmán, dialogue depuis plusieurs mois pour rééchelonner une dette de 44 milliards de dollars (environ 39,5 milliards d’euros) contractée en 2018 par le précédent gouvernement de droite de Mauricio Macri. Faute d’accord avec l’institution basée à Washington, l’Argentine aurait été confrontée à des remboursements, entre capital et intérêts, de plus de 19 milliards de dollars en 2022, autant en 2023, et environ 4 milliards en 2024. En 2021, 5,1 milliards d’euros ont déjà été versés.

«Nous avions une dette impayable qui nous laissait sans présent ni avenir, a poursuivi le président de centre gauche dans son allocution. Nous avons maintenant un accord raisonnable qui va nous permettre de croître et de respecter nos obligations grâce à notre croissance.» L’Argentine a en effet retrouvé en 2021 la croissance après trois ans de récession : +10,3% sur onze mois.

«Sentier fiscal»

L’accord prévoit des «facilités élargies de paiement», mais les deux parties devront «encore travailler sur les protocoles d’accord et cela prendra quelques semaines», a souligné Martín Guzmán. Le calendrier des échéances, qui s’étaleront sur dix ans, «sera défini par les mémorandums» à venir, a-t-il ajouté.

Le FMI a salué un «accord sur des politiques clés», dont un «sentier de consolidation fiscale» : l’Argentine s’engage en effet à réduire progressivement son déficit fiscal de 3% en 2021 à 0,9% en 2024. Selon la directrice générale du Fonds monétaire, Kristalina Georgieva, l’accord, qui doit être encore approuvé par le conseil d’administration de l’institution et par les députés argentins, permettra de «relever les défis actuels tels que l’inflation, et assurer une croissance plus inclusive et durable pour le peuple argentin».

Le gouvernement péroniste devra cependant faire accepter à sa population les ajustements qui accompagneront la réduction des dépenses publiques. En particulier la «stratégie de réduction progressive des subventions dans le secteur de l’énergie», jugée «essentielle» par le FMI. Une hausse des tarifs du gaz et de l’électricité, située entre 17% et 20%, devrait d’ailleurs être annoncée en février. Mais vendredi, Alberto Fernández s’en est tenu à une présentation optimiste de l’accord qui, selon lui, «n’impose pas de réforme du droit du travail, n’impactera pas les services publics, ne réduira pas les dépenses sociales et respectera les investissements dans la recherche et les technologues».

Budget 2022 rejeté

L’approbation du plan par le Congrès sera un autre écueil : en novembre, à l’issue des élections de mi-mandat qui renouvelaient pour moitié la Chambre des députés, le parti au pouvoir a perdu sa majorité. La première passe d’armes entre gouvernement et opposition remonte au 17 décembre, avec le rejet du budget 2022. La principale formation de droite, Ensemble pour le changement, affirme attendre le texte d’accord définitif pour décider s’il l’approuve ou non.

Le dernier défi pour l’Argentine est de juguler son inflation, qui a dépassé 50% en 2021, avec des perspectives sombres de 60% pour cette année. Ce n’est pas l’hyperinflation de 1989 et 1990, où les prix grimpaient de 1000% annuellement, mais ça fait mal quand même. Le recours à l’émission de monnaie a fait chuter la valeur du peso. La devise nationale s’échangeait il y a quelques jours à 223 pesos pour 1 dollar sur le marché parallèle, deux fois plus que la cotation officielle. Petit signe d’espoir : le «dólar blue» («parallèle») ne coûtait plus que 212 pesos vendredi, après l’annonce de l’accord avec le FMI.

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