Avec la foire Akaa, l’art contemporain africain s’ancre à Paris

À NE PAS MANQUER. La foire dédiée à l’art contemporain africain et sa diaspora change de date pour mieux s’ancrer dans le très dynamique marché parisien de l’art.

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La 7e édition de la foire internationale d'art contemporain Akaa (Also Known As Africa) se tient au cœur du quartier du Marais à Paris.
La 7e édition de la foire internationale d'art contemporain Akaa (Also Known As Africa) se tient au cœur du quartier du Marais à Paris. © Sylvie Rantrua

Temps de lecture : 6 min

Pour les collectionneurs et les amateurs d'art contemporain, c'est une semaine parisienne de folie. En parallèle de la première édition de Paris+ par Art Basel qui succède à la Fiac au Grand Palais Éphémère, dans l'effervescence de la nouveauté, ils peuvent aussi faire une halte à Akaa (Also Known as Africa) la foire dédiée aux scènes artistiques d'Afrique et de ses diasporas, qui se déroule du 20 au 23 octobre au Carreau du Temple, au cœur du Marais. Bien sûr, entre les 150 exposants représentant 30 pays de Paris+ et les 38 galeries présentes à Akaa, l'envergure n'est pas comparable ni le prix des œuvres.

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© Sylvie Rantrua
Cependant, en choisissant de s'adosser pour sa septième édition à cette semaine de l'art contemporain parisien, Akaa veut gagner en visibilité, tout comme les quelque 130 artistes exposés. « Depuis plusieurs années, nous réfléchissions à cette possibilité de déplacer Akaa sur les dates de la Fiac. Au départ, le positionnement (en novembre) sur Paris Photo nous paraissait intelligent, avec beaucoup de photos exposées pendant la foire. Depuis, l'Afrique a pris une place plus importante sur le marché de l'art et la foire a évolué et grandi avec une grande diversité de médias (peinture, sculpture, tapisserie…). La semaine de la Fiac nous était alors apparue comme un meilleur choix », explique Victoria Mann, fondatrice et directrice d'Akaa.

Encore fallait-il être patient et attendre que le créneau se libère, pour conserver le même espace du Carreau du Temple. « Le jour où “Galeristes”, qui était sur ce créneau, a annoncé qu'il ne venait plus au Carreau du Temple, nous avons saisi l'opportunité. Cela s'est même fait avant le switch Fiac-Paris+. Nous étions sur le point de l'annoncer quand le tsunami [le changement Fiac-Paris+, NDLR] a été annoncé dans la presse. Certaines galeries qui exposaient chez nous vont choisir d'exposer à Paris+, mais c'est le jeu. En même temps les collectionneurs internationaux qui se déplacent (hier pour la Fiac aujourd'hui pour Paris+) peuvent profiter pour venir ici », poursuit-elle.

Une œuvre de l'artiste togolais Foli Kossi Gérard TETE, de son nom d'artiste Tesprit, reconnaissable par sa technique basée sur le recyclage des sandales communément appelées « dzimakplao » (enfant sans instruction) au Togo.
 ©  Sylvie Rantrua
Une œuvre de l'artiste togolais Foli Kossi Gérard TETE, de son nom d'artiste Tesprit, reconnaissable par sa technique basée sur le recyclage des sandales communément appelées « dzimakplao » (enfant sans instruction) au Togo. © Sylvie Rantrua
« Pour cette septième édition, nous avons un grand retour des galeries du continent africain. La foire monte en qualité et en diversité », se réjouit Victoria Mann. Sur les 38 galeries exposantes, près de la moitié viennent pour la première fois à Paris, dont trois sud-africaines : The Melrose Gallery, Deepest Darkest et Kalashnikovv Gallery, mais aussi Walls House of Art de Côte d’Ivoire ou Soview Gallery du Ghana. Bien sûr, on retrouve les habitués, comme les galeries parisiennes Anne de Villepoix, Afikaris ou la galerie 193, la londonienne October Gallery ou la belge Claes Contemporary & Modern et l’ivoirienne Véronique Rieffel.

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Des artistes au firmament de l'art contemporain d'aujourd'hui

Impossible de passer à côté des superbes tapisseries d'Abdoulaye Konaté. Invité d'honneur, ses œuvres trônent sous la nef du Carreau du Temple. Artiste malien, reconnu au niveau international, il présente ici un travail abstrait de huit tapisseries inspirées par l'histoire et le travail des brodeuses du Maroc. Sur ses œuvres, il a inséré des pièces brodées au Maroc, dont un brocart ancien. « C'est un honneur d'accueillir un artiste de cette humilité et que l'on ne voit pas assez à Paris », souligne Armelle Dakouo, directrice artistique d'Akaa, tout en soulignant sa carrière internationale exceptionnelle.

Dans l'espace des Rencontres, on peut aussi découvrir les sculptures abstraites et organiques en tissu, voiles, et fils rigides de la Nigériane Nnenna Okore, représentée par October Gallery (Londres), invitée pour une carte blanche. Ses sculptures sont inspirées de son enfance et par les enjeux environnementaux. La foire s'ouvre aussi à l'art, sous sa forme innovante, avec Neuvième Toit, qui en collaboration avec l'artiste plasticien, danseur et photographe Willow Evann et 31 Project, propose une expérience immersive conjuguant à la fois la perception du monde réel et son miroir virtuel.

Des œuvres de l'artiste Adjaratou Ouédraogo.
 ©  Sylvie Rantrua
Des œuvres de l'artiste Adjaratou Ouédraogo. © Sylvie Rantrua
Parmi les exposants qui participent pour la première fois à Akaa la Galerie Françoise Livinec présente en solo show le travail d'Adjaratou Ouédraogo, réalisé à l'occasion d'une résidence en Bretagne. Soit vingt-trois œuvres peintes en août 2022. Le processus de création est surprenant. « Toutes les toiles sont posées à terre. Elle les peint en même temps, applique les couleurs, les formes se dessinent. Elle travaille sans relâche. Peu à peu, les figures apparaissent, contraintes dans le cadre », explique Gensane Parera, assistante à la Galerie Françoise Livinec. Autodidacte, l'artiste a au fil des ans élaboré une technique personnelle et puise son inspiration dans son histoire, celle d'une enfance traumatique qu'elle cherche à réparer.

Soview Gallery du Ghana explique qu'elle a choisi de venir à Akaa, pour s'ouvrir sur le marché francophone. Elle expose Tesprit, un jeune artiste togolais qui crée des tableaux à partir de tongs. Ces bouts de semelles, découpées, assemblées, dessinent des portraits d'enfants, sans visages. « Les invisibles », des enfants des rues, surnommés les dzimakplao, littéralement « enfants sans éducation » en mina, langue du sud du Togo. Ce mot signifie aussi tongs, des chaussures de tous les jours pour ces enfants des rues. L'artiste joue sur ce double symbole. Son travail commence dans la rue, à la rencontre de ces enfants. Il les photographie dans leur environnement pour s'en inspirer. Il collecte les tongs usagées, très peu recyclées, un peu partout, au bord de la plage, dans les décharges et les réutilise avec leur couleur originale pour sculpter ces portraits, sans visage, qui nous interpellent.

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La jeune garde présente aussi

La foire permet aussi de découvrir le prix Ellipse, qui récompense un artiste émergent non représenté par une galerie. Chaque année, le fonds de dotation Ellipse Art Projects, qui émane de la société française d'infrastructures Ellipse Projects, organise une compétition itinérante d'art contemporain. Né en Côte d'Ivoire, Assoukrou Aké a poursuivi ses études en France.

Le stand d’Ellipse Art Projects consacre un solo show au lauréat de son prix, Assoukrou Aké.
 ©  Sylvie Rantrua
Le stand d’Ellipse Art Projects consacre un solo show au lauréat de son prix, Assoukrou Aké. © Sylvie Rantrua
Touché par l'histoire de sa famille qu'il découvre peu à peu, il interroge l'histoire des enfants métis enlevés et placés dans des orphelinats pendant l'époque coloniale et leur sort une fois l'indépendance acquise. Sur des panneaux de contreplaqué peint en noir, il taille et grave. Contrastant, la couleur du bois apparaît, dessinant des corps, sans visage, ou plutôt au visage masqué par un symbole Akan. Et bonne nouvelle pour l'artiste, il sera bientôt représenté par la galerie Cécile Fakhoury (Abidjan, Dakar, Paris). Cette année, la galeriste qui fête ses dix ans, est d'ailleurs présente sur Paris+.

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Une foire à taille humaine

En parcourant les stands, on retrouve aussi avec plaisir des artistes confirmés, comme le peintre sénégalais Soly Cissé (galerie Chauvy, Paris), le Béninois Dominique Zinkpè (galerie Vallois, Paris) ou la Sud-Africaine Esther Malhengu, dont 87 petits tableaux au format A4 qu'elle a réalisé pour fêter ses 87 ans. Un petit point rouge indiquait que l'œuvre, présentée par The Melrose Gallery, avait été déjà acquise à l'ouverture de la foire.

L'artiste Papytsho Mafolo devant une de ses œuvres présentée à Akaa. 
 ©  Sylvie Rantrua
L'artiste Papytsho Mafolo devant une de ses œuvres présentée à Akaa.  © Sylvie Rantrua
Ce cru 2022 marque aussi le retour des artistes dans les stands – Abdoulaye Konaté, Papytsho Mafalo, Tesprit, Assoukrou Aké, Soro Kafana et bien d'autres–, qui viennent expliquer leur travail et rencontrer leur public, rendant la visite encore plus séduisante.

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* Du 21 au 23 octobre au Carreau du Temple (3e). akaafair.com

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