La justice a accordé, jeudi 17 mars, une suspension de peine « pour motif médical » à Yvan Colonna, après sa violente agression à la prison d’Arles (Bouches-du-Rhône), début mars, a appris l’Agence France-Presse (AFP) de source judiciaire.
Les avocats du militant indépendantiste corse – qui purgeait une peine à perpétuité pour sa participation à l’assassinat du préfet Claude Erignac, en 1998, à Ajaccio – avaient fait cette demande alors qu’il est toujours hospitalisé entre la vie et la mort. La loi prévoit qu’une peine de prison puisse être suspendue en cas de pronostic vital engagé.
Cette décision a été rendue par le juge d’application des peines antiterroriste, après avis favorable du parquet antiterroriste.
« C’est un soulagement pour la famille », a réagi l’un des avocats d’Yvan Colonna, Sylvain Cormier, saluant « le travail de la justice qui a utilisé pleinement le dispositif d’urgence » prévu par la loi. La décision signifie qu’Yvan Colonna « n’est plus sous main de justice et donc ne relève plus de l’administration pénitentiaire », a précisé la source judiciaire. Les visites de ses proches devraient être facilitées, un permis de visite n’étant désormais plus nécessaire.
Yvan Colonna avait été très grièvement blessé par un autre détenu qui s’était acharné sur lui à la prison d’Arles, le 2 mars. Il se trouve toujours dans le coma depuis, dans un hôpital à Marseille, dans un état « gravissime », selon l’un de ses avocats, Me Patrice Spinosi.
Son agresseur Franck Elong Abé purgeait plusieurs peines, dont une de neuf ans d’emprisonnement pour « association de malfaiteurs terroriste ». Il a été mis en examen le 6 mars pour « tentative d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste ».
Emmanuel Macron appelle au calme
Définitivement condamné depuis 2012 à la perpétuité, Yvan Colonna est libérable depuis 2021. Contrairement aux deux autres membres du commando ayant participé à l’assassinat du préfet, Alain Ferrandi et Pierre Alessandri, il n’avait pas déposé de demande d’aménagement de peine à la date de son agression.
Le gouvernement avait annoncé le 8 mars qu’Yvan Colonna n’était plus considéré comme « détenu particulièrement signalé » (DPS). « Cette décision (…) se fonde sur la particulière gravité de la situation de santé de M. Colonna », avait alors fait valoir Matignon.
Ce statut DPS a également été levé, vendredi, pour Pierre Alessandri et Alain Ferrandi, qui devraient donc pouvoir purger le reste de leur peine dans une prison corse.
En Corse, de multiples manifestations en soutien à Yvan Colonna ont été organisées ces deux dernières semaines, à l’appel notamment de syndicats étudiants et lycéens, et au cri d’« Etat français assassin ». Elles ont été émaillées de heurts et autres violences. Une nouvelle manifestation, le 13 mars à Bastia, a viré à « l’émeute », selon le parquet. Soixante-sept personnes ont alors été blessées, dont 44 membres des forces de l’ordre.
Emmanuel Macron a posé jeudi comme préalable à toute discussion sur le statut de la Corse le retour au calme. « Les violences que nous avons vécues ces derniers jours sont inacceptables. Je veux ici saluer le courage et le sang-froid de nos forces de l’ordre qui ont eu à subir un déferlement de violences inédit et inqualifiable », a dit le chef de l’Etat, lors d’une conférence de presse consacrée à la présentation de son programme pour la présidentielle.
« Nous sommes prêts à aller jusqu’à l’autonomie » concernant la Corse, avait assuré, mardi, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, dans un entretien à Corse-Matin. « La question est de savoir ce qu’est cette autonomie. Il faut qu’on en discute », a ajouté le ministre de l’intérieur. Mais le préalable à une discussion entre les élus corses et le gouvernement autour de l’avenir de la collectivité est le retour au calme, a insisté M. Darmanin : « Il ne peut pas y avoir de dialogue sincère en démocratie sous la pression des bombes agricoles et la présence, ou l’omniprésence, des forces de l’ordre. »
Dans cet entretien, le ministre avait également reconnu une « responsabilité de l’Etat, en tant que protecteur des personnes qui sont sous sa responsabilité, en l’occurrence des prisonniers », dans l’agression d’Yvan Colonna.
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